Pêche : le Gabon dénonce l’accord conclu avec l’Union européenne

Le président gabonais, Brice Clotaire Oligui Nguema a décidé mercredi en pleine réunion du conseil des ministres de dénoncer unilatéralement l’accord de pêche conclu en 2007 avec l’Union européenne pour insuffisance de rendement et risque inutile de surexploitation des ressources halieutiques du Gabon.

« Le Chef de l’État a indiqué que cet accord, dans sa formulation actuelle, ne saurait être reconduit en l’état. Il a souligné le caractère profondément déséquilibré du partenariat, dont les retombées économiques pour l’État gabonais restent largement insuffisantes, au regard de la richesse extraite de nos eaux territoriales par les flottes européennes », indique le communiqué final de la réunion du conseil des ministres tenue mercredi dans la capitale.

Oligui Nguema a notamment relevé que les recettes issues de cet accord ne compensent ni la valeur réelle des captures, ni les coûts assumés par l’État en matière de surveillance et de contrôle, ni les pertes de valeur ajoutée dues à l’absence de transformation locale.

Le texte ajoute que le numéro un gabonais a également dénoncé la faiblesse des investissements consentis par les partenaires au titre du développement local, de l’emploi ou du renforcement des capacités nationales, ainsi que les risques accrus de surexploitation des ressources halieutiques, en l’absence de mécanismes partagés de transparence et de suivi scientifique.

« En conséquence, le Chef de l’État a instruit le Gouvernement de mettre en œuvre la procédure de dénonciation unilatérale de l’accord, par voie de notification écrite adressée à la Commission européenne, conformément à l’article 13 dudit accord », annonce le communiqué.

« Cette dénonciation doit ouvrir la voie à une possible renégociation sur des bases rééquilibrées ou à l’exploration de nouveaux partenariats plus alignés sur les priorités nationales, notamment la mise en place de prérequis essentiels, pour lesquels le Gouvernement est  appelé  à  s’impliquer  pleinement,  comme  la  réalisation  des infrastructures indispensables au développement de cette filière : zones de débarquement modernes, entrepôts frigorifiques, unités de transformation industrielle, chantiers navals, etc », ajouté le communiqué.

Le Gabon et l’Union européenne sont en effet liés par un Accord de Partenariat de Pêche Durable (APPD).

Le Gabon a toujours estimé être floué par les européens dans cet accord. Sous l’ancien président Omar Bongo Ondimba, Libreville avait menacé de rompre l’accord parce que chaque année les chalutiers européens ne déclaraient que des quantités minables capturées au large du Gabon après 6 ou un an de pêche sans accoster dans les ports gabonais.

« Puisque vous ne trouvez rien dans nos eaux, je ne vois pas pourquoi renouveler chaque fois un accord pour lequel vous êtes perdant », avait ironisé le très rusé Omar Bongo.

L’Union européenne avait fait des concessions au Gabon qui à son tour avait reconduit le document.

Ali Bongo Ondimba, successeur d’Omar Bongo avait aussi menacé de suspendre l’accord en 2020. L’UE avait dépêché à Libreville ses fins négociateurs qui avaient fait plier le Gabon.

Ali Bongo souhaitait que le poisson pêché au Gabon soit débarqué au Gabon, quantifié par la douane gabonaise, subisse un premier traitement avant d’être envoyé en Europe. Les européens s’y étaient opposés soutenant que le Gabon n’a pas de ports adaptés aux normes européennes. Ils avaient également évoqué le manque criard des infrastructures de prise en charge d’un navire de pêche : chambres froides, unité de traitement de poisson et carburant trop cher entre autres. Des conditions que seule la Côte d’Ivoire remplissait à l’époque.

L’UE avait aussi fait valoir l’argument d’être un partenaire crédible par rapport aux chalutiers chinois qui opèrent dans une totale opacité.

Selon des experts, au Gabon, les européens ciblent notamment la pêche au thon, un poisson migrateur dont la présence dans les eaux territoriales gabonaises est très danse durant des périodes beaucoup plus longues que nulle part ailleurs.

Carl Nsitou

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