M. Babissakana qu’entouraient Mme Stolleretter les membres du panel de l’atelier exposant les contours de son rapport à Libreville @ Gabonactu.com
Libreville, Gabon (Gabonactu.com) – L’Accord de partenariat économique (APE) régional est un accord commercial de Libre-échange mais qui serait selon un rapport très désavantageux pour les pays de l’Afrique centrale lesquels ont une faible capacité de production pour faire face à la concurrence Européenne.
L’Union Européenne, concepteur de ce nouveau modèle économique controversé incite les pays de la sous-région Afrique centrale à signer et parapher cet accord qui préconise une suppression progressive des droits de douane sur les produits agricoles pendant une période de 15 ans. L’accord prévoit également jusqu’à 80% de libéralisation des exportations de l’UE vers les pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC).
Basée à Yaoundé au Cameroun, l’ONG allemande Friedrich Ebert Stiftung (FES) qui œuvre pour la justice sociale a organisé récemment à Libreville un atelier à l’intention de 25 journalistes gabonais. Un séminaire d’information pour relever les insuffisances contenues dans cet APE. « Nous pensons que cet accord n’est pas viable pour la sous-région. Les gouvernants et les populations doivent en prendre conscience », a interpelé lors de l’atelier, Susanne Stolleretter, représentante résidente du FES Cameroun/ Afrique centrale. Elle fonde ses allégations sur la base d’un rapport minutieux que son organisation a commandité auprès du cabinet Préscriptor.
Le cabinet camerounais Prescriptor a produit en novembre 2015 un rapport dénonçant l’APE signé entre le Cameroun et l’Union Européenne en janvier 2014. Le Cameroun est le seul pays de la sous-région qui a signé et paraphé cet accord de partenariat économique régional décrié. Cet accord n’a pas fait l’objet d’une étude d’évaluation préalable. Aussi d’après le rapport, le Cameroun a apposé sa signature sans en informer les autres Etats de la communauté. Selon Babissakana, l’auteur du rapport, « en signant seul un accord qui est régional, le Cameroun a commis une faute institutionnelle et politique graves ». Pour lui, cette procédure devrait se faire d’une manière concertée avec les pays de l’espace communautaire avec qui le Cameroun pratique les mêmes pourcentages ou préférences tarifaires. D’après l’expert, l’Union Européenne pratique une « intelligence économique » pour tirer vers le bas l’émergence impulsée de la sous-région. Les pressions seraient, a-t-il indiqué, exercer sur d’autres pays pour emboiter le pas au Cameroun.
Selon le rapport de 79 pages, cet APE proposé par l’UE ne respecte pas les critères de viabilité. « Il est requis qu’un accord commercial de libre-échange ne soit établi ou formé qu’entre les pays à niveau de développement comparable pour une division plus efficace du travail parce que fondée sur l’expression des avantages comparatifs et surtout des avantages compétitifs. La comparaison du niveau de développement entre le Cameroun et l’Union Européenne (et même chacun des 27 Etats membres de l’Union) indique un décalage développement très large à la faveur du Cameroun », relève le rapport qui fait une analyse pointue de cet accord. Pour étayer ces insuffisances que comporte l’APE régional, l’étude de Prescriptor donne les éléments de comparaison : « le produit intérieur brut (PIB) du Cameroun s’élevait à 21,2 milliards de d’euros contre un PIB de 12 924 milliards d’euros pour l’UE à 27 membres ». M. Babissakana conclu en disant « il y a donc là une asymétrie dans la structure et le niveau développement entre le Cameroun et l’Union Européenne ». Le décalage de développement est le même pour les 9 autres pays membres de la CEEAC dont le Gabon.
Parmi les autres critères de viabilité, les pays doivent avoir des économies à fort degré de concurrence et de spécialisation, de disposer un commerce mutuel important entre les membres et une forte complémentarité. Or, les pays de l’Afrique centrale ont des économies à très faible degré de concurrence interne contrairement à l’UE où l’on trouve des économies à fort degré de concurrence.
L’APE régional rentre en vigueur le 4 août 2016. Le chef de l’État gabonais, Ali Bongo Ondimba a été désigné en mai 2015 parrain des négociations par ses pairs réticents. Il mène depuis lors un processus économico-politique et économico-diplomatique auprès de ses homologues. Le rapport recommande que les pays de la région Afrique centrale puissent mettre en place une « véritable stratégie de pool de négociateurs solidaires disposant des capacités techniques et de moyens informationnels (rapports d’analyses et programmes de couverture d’impacts) et financier appropriés pour mener le dialogue permanent et approfondi avec l’Union Européenne ».
« Le Régime commercial le plus approprié pour une véritable stratégie d’émergence économique, de compétitivité et de développement industriel des pays d’Afrique centrale est le Régime de la Nation la plus favorisée », préconise également le rapport soulignant que le Gabon a déjà commencé a appliqué depuis le janvier 2014. Les trois autres régimes commerciaux à savoir : Tout sauf les armes (TSA) de l’UE, appliqué dans la sous-région, le Système de préférences généralisées (SPG) de l’UE appliqué au Congo-Brazzaville et le régime commercial de l’APE avec l’UE appliqué au Cameroun depuis le 1er janvier 2008 en remplacement du régime commercial de l’accord de Cotonou arrivé à échéance le 31 décembre 2007 ne peuvent, selon le rapport, assurer un développement structuré de l’Afrique centrale. L’ONG allemande Friedrich Ebert Stiftung s’est donnée pour mission de poursuivre une série d’ateliers dans les pays membres de l’Afrique centrale pour attirer l’attention des décideurs.
Sydney IVEMBI