Le Maquis intellectuel de Timothée Mémey : pétrole attention danger !

Le Gabon veut-il tuer la poule aux œufs d’or ? Depuis un certain temps, le pays prend des décisions audacieuses dans le secteur pétrolier. Il faut avoir un sacré culot  pour s’y risquer. On peut tous applaudir. Sinon crier à tue-tête tels des forcenés « enfin notre essor vers la félicité ». 

Tenez, en un mois, le Général-Président, Brice Clotaire Oligui Nguema, inspiré sans doute par les manitous du bord de mer, veut nationaliser le secteur pétrolier. Dans sa ligne de mire figure une cible tout indiquée : Assala Energy. Alors  que tout  était ficelé pour cette société vampirisée par les Bongo et compagnie prédisposée à être rachetée par Maurel & Prom, le bord de mer est sorti du bois pour faire valoir, ce que les  économistes  appellent, la préemption  de l’Etat sur cette vente. Bravo les gars, vous êtes à féliciter car « c’est enfin notre essor vers la félicité ».

Quelques jours plus tard, nous avons tous été témoins  d’une bagarre épistolaire entre l’Etat gabonais et la société chinoise Addax petroleum. A lire les correspondances, je  me suis dit « alléluia », mon pays se réveille enfin d’une longue hibernation. Les pôvres Chinois se sont battus comme des diables, mais rien à faire, le bord de mer s’est montré intransigeant.

Conclusion : les Chinois doivent plier bagages. « Nous sommes désormais libres ». Le coup de libération est aussi cela.

Bingo ! Tout se passe comme  à l’époque de nos aïeux qui ont vécu la proclamation d’indépendances postiches des années 60. «  Indépendances tchatcha » (de mes deux…)  qui avaient tout d’une arnaque. Bêtement ils ont bu et dansé. Bye-bye les travaux forcés. Bye-bye la chicotte, bye-bye les maîtres blancs.

Et après, où en sommes-nous aujourd’hui ? Je m’interroge !  Tout l’héritage laissé par ces salopards de colons est en ruine sinon cédé à vil prix à des privés devenus les colons des temps modernes. La poste ? En ruine ; Gabon télécom ?  Bradé. Imaginez la suite. Est-ce que ce pays est sérieux ?

Comme si on n’a pas appris les leçons de nos erreurs du passé, on veut répéter l’histoire. Voulons-nous vraiment nationaliser le secteur pétrolier? Non, ne riez pas.  Posons-nous maintenant la mauvaise question qui fâche : sommes-nous brusquement devenus capables de gérer et de bien gérer une compagnie pétrolière ? Je sais que les courtisans aux petits pieds et autres bénis oui-oui diront bêtement oui.  Mais moi, j’en doute. Je m’explique : je vais vous brandir quelques exemples bêtes: le coup d’Etat dit « de la libération » n’a pas apporté les changements souhaités. Pas du tout. Certaines ethnies du fait de leurs ‘’actes de bonne naissance’’ occupent toujours les postes juteux. Suivez mon regard. Demain, lorsqu’il  s’agira de gérer les entreprises conquises, les mêmes critères de médiocrité vont prévaloir au détriment de l’excellence. Coquins et copains vont organiser le bal des vampires et sabler le champagne.

Tenez : Pour essayer de comprendre, interrogeons l’histoire. Gabon Oil Compagny (GOC) a été crée en 2011. Que fait ce gouffre à sous aujourd’hui ? Combien de traders gabonais ce truc a-t-il formé ? Combien de sites pétroliers a-t-il développé ?  Rien. Ses filiales réussissent l’exploit des déficits abyssaux. Jusqu’à 3 milliards de FCFA de pertes en 2022 pour Gabon Oil marketing chargé de vendre le carburant. Pathétique !

Les savants du bord de mer se souviennent que la société avait ravi au Chinois Sinopec le site pétrolier d’Obangué. En trois mois seulement d’exploitation, c’était la bérézina. La GOC avait réalisé le record de chute de production qui a dégringolé de 8000 barils jour/à 4000 barils/jour. Pour essuyer la honte comme on sait le faire, le site avait rapidement été rétrocédé en catimini aux chinois qui ont stabilisé la chute et remonté la  production. L’expérience d’Obangué est riche d’enseignements. Ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres que je me garde de citer par décence. Cessons de faire peur aux investisseurs.

L’étoilé en chef doit le savoir, lui qui était à la tête des services de renseignements. Laissons les professionnels qui ont l’expertise à leurs postes. Ne plongeons pas dans la fange tels des charognards affamés. Sinon le risque de détruire ce secteur deviendrait inéluctable.

L’Angola n’est pas le Gabon parce que la source d’inspiration actuelle du Gabon est le modèle angolais. Si le Gabon veut s’inspirer du modèle angolais, c’est simple : on doit d’abord aller former nos cadres à la TAAG, la compagnie aérienne angolaise qui continue de voler alors qu’elle n’atteignait pas la défunte Air-Gabon à la cheville.

Quand le Gabon aura réussi l’exploit de créer une compagnie aérienne de la taille de la TAAG, on pourra ainsi négocier avec la SONAGOL un autre stage de formation pour la reprise du contrôle total de notre secteur pétrolier et ainsi tambouriner sur tous les toits « notre essor vers la félicité ».  

Timothée Mémey, journaliste éditorialiste indépendant

NB : cette chronique ne reflète pas le point de vue de la rédaction

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