Des insultes aux menaces, en passant par la diffamation et les arnaques, les réseaux sociaux gabonais sont devenus un théâtre d’indécence généralisée. Entre dérives des créateurs de contenus et indifférence des autorités, la toile se transforme en un véritable Far West numérique, piétinant chaque jour un peu plus les valeurs et les repères moraux du pays au nom de la liberté d’expression.
Ah, Internet ! Cet espace autrefois porteur d’espoirs d’émancipation, d’ouverture et d’innovation. Mais au Gabon, il semble que la toile ait pris une tournure bien particulière : celle d’un vaste terrain vague où insultes, menaces, diffamation et harcèlement sont devenus des sports nationaux. Les créateurs de contenus, internautes et soi-disant activistes rivalisent d’ingéniosité… non pas pour élever le débat public, mais pour creuser toujours plus profond dans le gouffre de la dépravation.
Le respect de la vie privée ? Une notion devenue obsolète. À longueur de posts, de vidéos et de lives, on expose, on salit, on détruit la réputation d’autrui sans le moindre scrupule. Le droit à l’image ? Un concept que certains prennent pour une blague, relayant des photos et vidéos à caractère privé sans aucune autorisation. Les insultes ? Elles fusent à la vitesse de la fibre optique. Les menaces ? Elles se multiplient, parfois derrière l’anonymat confortable d’un pseudo. Les arnaques ? Elles pullulent, exploitant la naïveté de ceux qui cherchent simplement à s’en sortir.

La Haute Autorité de la Communication (HAC) a beau brandir des menaces, publier des rappels à l’ordre, rien n’y fait : la toile gabonaise devient chaque jour un peu plus cet immense terrain de libertinage numérique où les règles républicaines semblent s’être volatilisées. L’éthique ? La morale ? L’éducation civique ? Évaporées dans un océan de likes et de partages viraux.
Ce spectacle affligeant ne serait pas si inquiétant si ses conséquences restaient virtuelles. Mais elles débordent largement de l’écran pour gangrener la société. La banalisation de l’irrespect sur les réseaux a un effet miroir sur le comportement des plus jeunes. Comment espérer bâtir une société forte, si les valeurs de respect, de civisme, de décence sont sacrifiées sur l’autel de la viralité numérique ?
L’éducation devrait être le rempart contre ces dérives. Mais trop souvent, parents, écoles, institutions ferment les yeux, laissant les jeunes s’éduquer eux-mêmes sur les réseaux… avec les dérives qu’on connaît. Pourtant, la loi est claire : harcèlement, diffamation, violation de la vie privée sont des délits passibles de sanctions. Mais encore faudrait-il que ces lois soient appliquées avec rigueur et constance.
Plus grave encore, cette dérive numérique traduit une crise plus profonde : celle des repères moraux. Nos mœurs, nos valeurs gabonaises, fondées sur le respect d’autrui, la solidarité, la pudeur et la responsabilité, se retrouvent aujourd’hui dénudées de tout fondement républicain, sacrifiées à la vitesse de la 4G.
Faut-il donc laisser la toile gabonaise devenir un Far West numérique où chacun fait ce qu’il veut, comme il veut, au mépris des droits et de la dignité des autres ? Ou bien est-il temps, enfin, de rappeler que la liberté d’expression n’est pas la liberté de salir, d’insulter, d’arnaquer ou de menacer ?
Il est urgent de réveiller les consciences. De renforcer l’éducation numérique dès le plus jeune âge. D’appliquer fermement les lois existantes. Et surtout, de remettre l’éthique et la morale au cœur de la vie publique, en ligne comme hors ligne.
Car un peuple qui renonce à ses valeurs fondamentales, même sur Internet, creuse doucement sa propre tombe culturelle et sociale. Et cette tombe, aucun nombre de likes ne pourra jamais la combler.
Juldas Stevince BIWAGOU, Manager, Communicant et homme de Médias
NB : cette tribune libre ne reflète pas le point de vue de la rédaction de Gabonactu.com
