Les Assises du LMD au Gabon ayant pris fin ce mercredi 20 mars en milieu d’après-midi, j’ai décidé de braver le sacrosaint principe qui voudrait que les absents aient toujours tort. Ils n’étaient pas présents et n’ont donc rien à dire. Ils doivent fermer leur clapet.
En effet, et pour des raisons totalement indépendantes de ma volonté, je n’ai pas pu prendre part à ces assises.
Et pourtant, je ne peux, malgré toute ma bonne volonté, me taire.
La restauration de l’Université gabonaise étant une préoccupation nationale, qui engage directement et indirectement tous les citoyens, je ne peux pas, au regard de ma riche expérience en tant qu’expert et praticien du LMD, au public comme au privé, me priver d’apporter ma modeste contribution, quitte à jouer les troubles fêtes. L’avenir de l’Université gabonaise nous incombe à toutes et tous, celles et ceux qui ont été invités et qui ont pris part auxdites Assises et celles et ceux, plus nombreux, qui les ont suivies de loin, ou qui ne les ont pas suivies du tout, mais à qui leurs conclusions vont s’imposer.
J’ai donc décidé de publier une série de textes pour commenter et critiquer les recommandations desdites Assises, dans le seul souci de la construction, et c’est dans ce même cadre que j’enverrai au Ministre de l’Enseignement Supérieur, ainsi qu’au Premier Ministre de la Transition, mes observations de forme et de fond, en espérant qu’il ne sera pas trop tard, dans le sens où les décrets entérinant les recommandations de ces Assises du LMD seront déjà pris.
Ce deuxième texte traite de la problématique des établissements privés, confrontés, comme ils sont, au piège de Thucydide ainsi qu’à l’évangile du Professeur Alain ONDOUA de l’Université Yaoundé 2, expert invité par le Ministère pour émerveiller les Assises du LMD, pour affirmer la primauté des établissements publics sur les privés, les premiers devant être assujettis aux derniers, ce que je conteste naturellement.
Dans une première articulation, je déconstruis cette recommandation aux relents de mépris pour les institutions privées d’enseignement supérieur au Gabon. Dans une seconde articulation, je montre, à partir faits tirés du marché mondial de la connaissance et du savoir, pourquoi le privé est dorénavant la référence et pourquoi cette réalité ne peut pas ne pas s’imposer au Gabon, chez nous, si l’objectif réel est de redynamiser l’Université gabonaise. Dans une troisième articulation, je décris, avec force et détails, ce qu’il est convenu d’appeler « le piège de de Thucydide » dans les attitudes de la tutelle, des établissements publics et même des enseignants-chercheurs du public vis-à-vis des établissements privés. La conclusion de ce texte insiste sur la nécessité d’un véritable dialogue entre le public et le privé pour définir et mettre en œuvre un cadre consensuel de collaboration, dans un dispositif national de formation et de recherche cohérent.
- UNE RECOMMANDATION DES ASSISES DU LMD AUX RELENTS DE MEPRIS POUR LES INSTITUTIONS PRIVEES D’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR
J’ai suivi, en streaming sur Facebook, avec beaucoup d’attention, la lecture du rapport final des Assises du LMD par notre brillante collègue, Madame le Professeur Eugénie EYEANG, de l’Ecole Normale Supérieure de Libreville (ENS), par ailleurs, Inspecteur Général du Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation Technologique.
J’étais assis sur ma chaise et j’ai bondi en l’entendant lire cette curieuse recommandation, d’après laquelle, les Universités, Ecoles et Instituts privés du Gabon seraient placés sous la tutelle des établissements publics.
J’ai été choqué!
J’ai été choqué, et même très peiné, qu’on en arrive à ce type de conclusions péremptoires, sans qu’il n’y ait eu, au Gabon, le moindre débat sur la problématique des établissements privés d’enseignement supérieur. Ce que le Parlement a toujours pourtant demandé à chaque Ministre en charge de l’Enseignement Supérieur.
Je suis d’autant plus surpris que tous les établissements privés habilités l’ont été par le Ministère de l’Enseignement Supérieur à, l’issue d’un examen de leurs dossiers respectifs par les commissions instituées et habilitées à les accréditer. Le Ministre actuel est, d’ailleurs, celui qui a même réussi, et c’est tout à son honneur, à faire aboutir le projet de décret initié par ses prédécesseurs portant habilitation à fonder et autorisation à ouvrir pour 64 établissements.
Ces établissements sont donc reconnus par l’Etat et ont la personnalité juridique, académique et scientifique pour délivrer leurs formations et diplômes, certains pour les cycles L et M, et d’autres pour les trois cycles L, M et D.
On aurait pu imaginer que cette reconnaissance ait été précédée d’une véritable évaluation, par un organisme indépendant, le CAMES par exemple, pour identifier ceux des établissements les mieux à même d’être « accrédités » pour être des Universités, des « Ecoles », ou des « Instituts ». Il n’en a rien été.
Au lieu de cela, on a, dans le même décret, reconnu tous les établissements, les plus crédibles, comme les moins crédibles, les plus dynamiques, comme les moins dynamiques.
Du coup, cette curieuse recommandation, sans aucune réelle motivation, fait comme si tous les établissements privés étaient donc d’un niveau inférieur, pour être finalement coachés par des établissements publics qui, en ce qui concerne l’ingénierie LMD, sont loin d’être la référence.
Cette recommandation est donc tout simplement absurde et même méprisante vis-à-vis des établissements privés qui, globalement, font un travail remarquable, chacun avec ses forces et faiblesses, exactement comme les établissements publics, qui n’ont pas tous le même niveau et n’offrent pas, tous, les mêmes perspectives.
En effet, on peut se demander quelle grande école publique, quel institut public, quelle université publique au Gabon peut remettre en cause la pertinence des projets comme BGFI Business School (BBS), ou l’Université Internationale de Libreville (UIL), pour me limiter à ces deux exemples, parmi la dizaine d’établissements privés d’enseignement supérieur du Gabon, qui font la fierté de notre pays ?
- L’UNIVERSITÉ PUBLIQUE ET L’UNIVERSITE PRIVÉE DANS LE MARCHÉ MONDIAL DU SAVOIR ET DE LA CONNAISSANCE
Le débat gabono-gabonais, pimenté par des collègues étrangers, payés et missionnés pour vendre leurs modèles, clés en main, sur la place de l’Université publique et de l’Université privée au Gabon a été, de mon point de vue, expédié de manière trop lapidaire aux Assises du LMD, tenues à l’INSG du 18 au 20 mars, du moins par rapport à ce que j’ai pu suivre à distance. Il est possible qu’une partie des débats m’ait échappé.
Et pour cause, une idéologie savamment entretenue par la tutelle et déjà visible dans le sombre débat d’il y a quelques semaines sur les Ecoles Doctorales qui ne devraient exister que dans les trois grandes universités publiques, a été naturellement plébiscitée et formalisée dans la longue litanie des recommandations : « les Assises de LMD recommandent de mettre sous tutelle des établissements publics les programmes de formation et les diplômes des établissements privés ».
Dans une organisation bien huilée, il n’a pas été très difficile, pour les adeptes, forcément et préalablement convaincus, d’entériner une idée préconçue. La messe a donc été dite, et tous les fidèles ont naturellement crié « amen ! », en remerciant le bon dieu pour avoir inspiré leur bon Pasteur.
Dans un texte de vulgarisation, que j’ai publié sur les réseaux sociaux, pour fustiger les propos péremptoires du Professeur Alain ONDOUA , le « French doctor » de circonstance, qui a donc été missionné pour faire gober aux naïfs fidèles de l’Eglise du réveil, le modèle camerounais de gestion des Instituts privés d’Enseignement Supérieur (IPES) comme solution miracle pour révolutionner l’enseignement supérieur au Gabon, j’ai montré le caractère absurde de cette démarche, qui ne repose sur aucun argument scientifique d’autorité.
Il faut dire, et on doit le dire, que notre illustre collègue le Professeur Alain ONDOUA, bien qu’ayant été Directeur de l’AUF pour l’Afrique Centrale et des Grands Lacs et bien qu’assumant, après cette expérience « aufienne », les fonctions de Doyen de la Faculté de Sciences Juridiques et Politiques de l’Université Yaoundé 2, n’a jamais servi dans l’administration centrale du Ministère de l’Enseignement Supérieur au Cameroun, ou ailleurs, en France, au Canada, en Afrique, …, et ne semble donc pas maîtriser le système, ou le mécanisme d’accréditation des IPES, ainsi que des Universités privées au Cameroun.
Pour une meilleure présentation du modèle camerounais, que je respecte, et c’est très important de le rappeler – parce que c’est un modèle très efficace pour le Cameroun et uniquement pour le Cameroun – il aurait été, à mon sens, plus indiqué qu’on invitât l’Inspecteur Général des Services du MINESUP (acronyme local pour référer au Ministère de l’Enseignement Supérieur), en la personne de notre illustre collègue, Monsieur le Professeur Patrick ABANE ENGOLO, qui a travaillé sur les textes d’accréditation des établissements privés ; voire même le Directeur des Accréditations Universitaires et de la Qualité (DAUQ), notre cher collègue, le Professeur Dieudonné PEGNYEMB, tous deux auraient mieux édifié sur le système camerounais.
Le Doyen ONDOUA est tout simplement, en sa qualité de doyen d’une faculté, en charge de la mise en œuvre des décisions et recommandations de la tutelle sur les établissements proposant une formation en sciences juridiques et politiques uniquement. Rien de plus, rien de moins.
Sur un plan technique, l’expertise affirmée du Professeur Alain ONDOUA, à la fois comme enseignant-chercheur et comme institutionnel, serait, à mon sens, la bienvenue, lorsqu’il s’agira de « fabriquer » les référentiels des formations en sciences juridiques et politiques.
Dans leur Mémorandum adressé au Ministre de l’Enseignement Supérieur, au Premier Ministre de la Transition, ainsi qu’au Président de la Transition, Président de la République, Chef de l’État, les Établissements privés de l’Enseignement Supérieur, réunis au sein de la Conférence gabonaise des Grandes Écoles et Universités du Privé (CGEUP), avaient déjà, en octobre dernier, souhaité la tenue des Assises du LMD et indiqué quelques pistes de solutions pour améliorer le dispositif national de l’enseignement supérieur, ainsi que des pistes de solutions d’une collaboration plus dynamique entre établissements publics et privés. Nombre de ces pistes de solutions ont été retenues par lesdites Assises du LMD sous forme de recommandations.
Il ne s’agit donc pas, pour moi, de vouloir jeter le bébé avec l’eau du bain.
Partant des objectifs assignés à ces Assises du LMD, le propos de notre collègue Alain ONDOUA aurait eu tout son sens, s’il avait été préalablement démontré que la non application du LMD, ou la mauvaise application du LMD au Gabon depuis 2007, était due, en totalité ou en partie, au fait que la collation des grades et la diplomation ont été autorisées aux établissements privés.
Sur cette base, il aurait donc été pertinent et légitime de soutenir l’idée d’une inféodation des établissements privés aux établissements publics, dans une dynamique nouvelle, où, comme au Cameroun, les IPES/EPES ne seraient plus que des sous-traitants des Universités publiques, dont ils exécuteraient, sous leur contrôle, les programmes. L’Université publique évaluerait l’EPES sous sa tutelle, superviserait les examens et délivrerait, in fine, les diplômes. En retour l’IPES/EPES verserait à l’Université publique toute puissante l’argent exigé pour son accompagnement.
J’ai montré que ce modèle, tout intéressant qu’il soit, n’est pertinent que pour le Cameroun. Il marche très bien au Cameroun, dans un système bien huilé, où la loi portant orientation de l’Enseignement Supérieur (loi n• 2023/004 du 25 juillet 2023) distingue les Instituts Privés d’Enseignement Supérieurs (qui sont sous tutelle académique des Universités publiques) des autres institutions ayant acquis le statut d’Université (à cet égard, ni l’Université Catholique d’Afrique Centrale ni l’Université Protestante d’Afrique Centrale, n’est sous tutelle d’aucune université publique).
Malgré tout, il ne s’agit pas d’un modèle idéal, autrement, il aurait été appliqué, sinon dans tous les pays du monde, du moins en Afrique, ne serait-ce que dans l’espace CAMES. Sa généralisation aurait donc été naturellement actée par la Conférence des Chefs d’Etat de la CEMAC, dans le cadre de l’Espace CEMAC d’Enseignement Supérieur, de Recherche et de Formation Professionnelle, dont j’ai été un des principaux experts et, plus récemment, Directeur de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de la Formation Professionnelle de la Commission de la CEMAC (2020-2022). Or, il n’en est rien. Comment, dès lors, applaudir le « Pasteur » Alain ONDOUA, qui vient dire sa messe, autrement que sous le sceau d’un partage d’expérience ?
Pour transposer le modèle d’organisation de l’enseignement supérieur du Cameroun au Gabon, il y aurait nécessité de procéder à une reclassification des EPES, en distinguant clairement ceux pouvant être considérés comme EPES/IPES et placés éventuellement sous tutelle d’une Université publique, le problème devra être posé et discuté sereinement en mettant en avant l’intérêt du pays, et ceux ayant acquis le statut d’Université et présentant les capacités et perspectives d’une université devant échapper à toute inféodation. Mais dans ce cas, on devra respecter les droits acquis des EPES existant et déjà accrédités.
Lorsqu’on jette un coup d’œil dans la dynamique mondiale, le marché mondial du savoir et de la connaissance, devrais-je dire, on s’aperçoit, très vite, que les meilleurs Universités et établissements d’enseignement supérieur au monde sont des privés, qui fonctionnent comme des entreprises privées, sans subir la pression permanente des ministres de tutelle dans leurs pays respectifs.
En effet, le top 100 des meilleures universités au monde confirme cette vérité biblique.
Si on se réfère au classement mondial des universités 2024 du Times Higher Education (THE), entre autres, qui évalue 1 906 universités dans 108 pays et régions dans le monde, à partir de 18 indicateurs de performance soigneusement calibrés, qui mesurent la performance d’un établissement dans cinq domaines : l’enseignement, l’environnement de recherche, la qualité de la recherche, l’industrie et les perspectives internationales, il apparaît que les meilleures universités et établissements d’enseignement supérieur dans le monde sont privés. Ils ne sont pas placés sous la tutelle des Universités publiques dans leurs pays respectifs.
Pour être plus précis, 7 des dix premières universités et établissements d’enseignement supérieur du monde sont privés, à savoir, (R1) University of Oxford, (R2) Stanford University), (R3) Massachusetts Institute of Technology, (R4) Harvard University, (R6) Princeton University, (R7) California Institute of Technology et (R10) Yale University. Dans ce classement, seuls trois institutions publiques apparaissent dans le Top ten, à savoir, (R5) University of Cambridge, (R8) Imperial College London et (R9) University of California, Berkeley.
Au total, 99 pays ou régions sont représentés dans le classement et 27 d’entre eux ont au moins une université dans le top 200. 452 autres universités sont répertoriées avec le statut de « rapporteur », ce qui signifie qu’elles ont fourni des données mais n’ont pas satisfait à aux critères d’éligibilité du THE pour recevoir un classement.
Tant en termes de classement général que de positions les plus élevées, les États-Unis et le Royaume-Uni sont bien représentés. Le Japon et la Chine font partie des pays les mieux représentés dans le classement, mais ils se situent derrière d’autres nations, comme l’Allemagne, l’Australie et les Pays-Bas, pour ce qui est des universités figurant parmi les 200 premières.
Je voudrais, pour éclairer la lanterne de tous les naïfs fidèles du « Pasteur » Alain ONDOUA aux Assises du LMD des 18, 19 et 20 mars 2024 à Libreville, esquisser une brève présentation des sept meilleures institutions universitaires dans le monde, des privées, d’après le classement THE en 2014 :
UNIVERSITY OF OXFORD:
Située dans la ville du même nom, à 90 km au nord-ouest de Londres, dans le comté d’Oxford ou Oxfordshire, dans l’Angleterre du Sud-Est, est l’une des plus prestigieuses universités sur le plan mondial. Elle est également la plus ancienne université britannique. Sa fondation progressive se place pendant la querelle du roi d’Angleterre Henri II et de l’archevêque Thomas Becket, rivalité de pouvoir qui éclate en 1164 et se clôt par l’assassinat de Becket, fin 1170. Après 1165, le roi ne cesse d’octroyer des libertés et des privilèges à ce groupement d’écoles isolées du grand diocèse de Lincoln. Mais le véritable démarrage de l’université date de 1167, lorsque le roi Henri, constatant les classes à moitié vides malgré les crédits accordés, interdit aux étudiants anglais de suivre les cours de l’Université de Paris et fait rappeler manu militari les clercs anglais de Paris ou dispersés en France et sur le continent européen. The University of Oxford peut être considérée comme une université publique dans le sens où elle reçoit d’importants subsides du gouvernement, mais aussi comme une université privée dans le sens où elle est entièrement autogérée, et pourrait tout à fait choisir de devenir complètement privée en refusant les subsides du gouvernement.
STANFORD UNIVERSITY:
Stanford University, de son vrai nom Leland Stanford Junior University, est une université américaine privée, située dans la Silicon Valley au sud de San Francisco. Sa devise est « Die Luft der Freiheit weht » qui signifie « Le vent de la liberté souffle ». Arrivant parmi les premières universités au monde dans la plupart des classements internationaux, elle jouit d’un grand prestige. La communauté de Stanford compte actuellement 21 lauréats du prix Nobel.
MASSACHUSETS INSTITUTE OF TECHNOLOGY
Massachusetts Institute of Technology (MIT), en français Institut de technologie du Massachusetts, est un institut de recherche américain et une université, spécialisé dans les domaines de la science et de la technologie. Établissement privé situé à Cambridge, dans l’État du Massachusetts, à proximité immédiate de Boston, au Nord-Est des États-Unis, le MIT est considéré comme une des meilleures universités du monde (classée première par Quacquarelli Symonds en 2024).
HARVARD UNIVERSITY
Harvard University, ou plus simplement Harvard, est une université privée américaine située à Cambridge, ville de l’agglomération de Boston, dans le Massachusetts. Fondée le 8 septembre 1636, c’est le plus ancien établissement d’enseignement supérieur des États-Unis. Harvard est l’une des institutions les plus prestigieuses au monde, en raison de son histoire, de son influence, de sa richesse et de sa réputation. Elle apparaît comme la première université du monde dans de nombreux classements, dont celui de Shanghai.
PRINCETON UNIVERSITY
Princeton University, aussi appelée Princeton, est une université américaine privée située dans la ville de Princeton (New Jersey), aux États-Unis. Fondée en 1746, elle est le quatrième plus ancien établissement d’enseignement supérieur des États-Unis. Arrivant parmi les premières universités au monde dans la plupart des classements internationaux, elle jouit d’un grand prestige1. Elle est membre de la Ivy League où elle entretient une rivalité historique avec l’université Harvard et l’Université de Yale. Elle a formé 65 prix Nobel, 15 médailles Fields, 21 National Medal of Science, 11 National Humanities Medal, 3 présidents américains et 12 juges à la Cour suprême des États-Unis.
CALIFORNIA INSTITUE OF TECHNOLOGY.
California Institute of Technology, en abrégé Caltech, ou plus rarement CIT, est une université privée américaine créée en 1891. Elle se situe à Pasadena, à l’est de Los Angeles, en Californie. Elle compte près de 500 professeurs et chercheurs et de 2 700 étudiants dans un campus qui accueille aussi le Jet Propulsion Laboratory (JPL) de la NASA, où travaillent 5 200 personnes. Elle a contribué à former plus de trente prix Nobel ainsi que cinq prix Crafoord et de nombreuses personnalités distinguées par des prix américains dans les domaines de la science, de la technologie et de l’ingénierie.
YALE UNIVERSITY
Yale University est l’une des huit universités privées de l’Ivy League. Elle a été créée en 1701 et située à New Haven, dans le Connecticut. En 1718, elle a été rebaptisée Yale College, en l’honneur du bienfaiteur gallois Elihu YALE, et elle a été la première université des États-Unis à décerner un doctorat, en 1861. Les étudiants internationaux viennent de loin pour étudier à Yale. L’Université vise à être l’université de recherche la plus centrée sur les étudiants dans le monde.
J’ai beau chercher, mais je n’ai vu, dans ce classement comme dans les autres classements que j’ai consultés (par exemple le classement de Shanghai), aucune super université publique du Gabon devant tracter les « pauvres » établissements publics, à la traine,en d’autres termes, la roue crevée du carosse, ce qui aurait donc grandement crédibilisé la théorie du Professeur Alain ONDOUA.
Les universités publiques du Cameroun sont parmi les meilleures en Afrique, c’est un fait incontestable ! Les collègues du Cameroun, qui me connaissent, savent tout le bien que je pense d’eux et de leur dynamisme hors pair. Je ne fais donc pas et ne ferai jamais dans l’anti camerounais, bien au contraire. Mes amis, mes très chers collègues, les Professeurs Magloire ONDOA (Recteur de l’Université de Douala), Roger TSAFFACK NAFONSO (Recteur de l’Université de Dschang), André TIOUMANGNEG (Université Yaoundé 2), Gisèle ETAME (Université de Douala), Brusil Miranda METOU (Université Yaoundé 2), Luc SINJOUN (Université Yaoundé 2), Paul Jérôme Elvic BATCHOM (IRIC), Jean NJOYA (Université de Dschang), Hervé Magloire MONEBOULOU MINAKA (Université de Douala), René NJEUFFACK TEMGWA (Université de Dschang), Victor TSAPI (Université de Douala), Joseph KETCHEU (Université Yaoundé 2), Herman TOUO (Université de Ngaoundéré), Appolinaire FOULLA DAMNA (Université de Maroua), Emmanuel WONYU (IRIC), entre autres, ne me le pardonneraient pas, et ils auraient raison.
Ce que je conteste, bien entendu, c’est qu’un individu, fut-il éminent Professeur agrégé, en vienne à proclamer un évangile de la religion catholique, qui ne cadre pas avec la cosmogonie des « bwitistes », ou des « njobistes » du Gabon.
Ce que je désapprouve – et je suis absolument choqué – c’est que tous les experts présents dans la salle aient gobé cet évangile sans crier garde !
- LE PIEGE DE DE THUCYDIDE
« Le piège de Thucydide » est un concept de relations internationales, qui désigne une situation, où une puissance dominante entre en guerre avec une puissance émergente, la première étant poussée par la peur que suscite chez elle cette dernière du fait de sa montée en puissance. On se référera à Allison (2015 et 2019), ou à Zajec (2017), pour une explicitation de ce concept.
Le nom « Thucydide » fait référence à un passage de la guerre du Péloponnèse dans lequel l’auteur, Thucydide, considère que cette guerre a été causée par des réactions fortes des Lacédémoniens, à l’époque inquiets en constatant le rapide développement d’Athènes. La perception de la montée en puissance de la cité-État rivale aurait été pour eux un casus belli majeur, bien qu’inavoué.
Allison soutient donc que l’histoire du monde regorge d’affrontements armés déclenchés par l’inquiétude, ou la paranoïa d’un acteur établi face à l’hybris d’un nouveau rival. Il considère que les États-Unis et la Chine, du fait du développement de cette dernière, sont d’ores et déjà, au début du XXIè siècle, engagés dans une pente presque inéluctable qui les mènera à se mesurer militairement.
Allison a ainsi recensé, avec un laboratoire de Harvard University, 16 occurrences du piège de Thucydide dans l’Histoire. Il montre que 12 d’entre elles ont débouché sur la guerre.
De mon point de vue, l’analogie du piège de Thucydide » avec la relation quasi-conflictuelle entre établissements publics d’enseignement supérieur et établissements privés au Gabon tient effectivement de la peur des premières face à la montée des dernières citées.
De la création de l’Université nationale du Gabon en 1970 jusqu’à la fin de la première décennie du nouveau millénaire, l’Université publique gabonaise jouissait d’un monopole absolu. Elle était la référence. Pour prendre l’exemple d’un établissement public dont j’ai été directeur général, l’Institut National des Sciences de Gestion (INSG), il était le passage obligé pour obtenir un emploi dans les domaines de la gestion, et tous les récipiendaires du BTS ou de la maîtrise en sciences de gestion obtenaient très rapidement un emploi dans les six mois ou l’année suivant la fin de leurs études. C’était la belle époque. Aujourd’hui, les choses ont bien changé. Il y a au Gabon, 64 établissements privés reconnus par l’Etat, qui délivrent, en mieux pour beaucoup, les mêmes programmes et diplômes. Cet établissement est donc moins reluisant et croule sous l’absence de structures et de moyens ainsi qu’une gouvernance décrite comme absolument catastrophique ces dernières années. Les établissements privés sont donc nés, avec une dynamique et une efficacité que ne peuvent avoir les établissements publics, dont la seule force demeure l’argent de l’Etat et seulement l’argent de l’Etat. Cette réalité est visible dans tous les domaines.
Donc, dans un tel contexte, le raccourci le plus évident, et c’est ce que les nègres savent faire de bien, c’est le mépris, la jalousie et la haine.
Combien de fois n’ai-je entendu des collègues de l’Université Omar Bongo, où j’ai l’honneur d’assumer mes fonctions de Professeur Titulaire, me vilipender et dénigrer mon établissement, l’EM GABON-Université, au seul motif qu’il est privé, et que ce seul fait le condamnerait à la médiocrité. La stupidité de ces collègues est telle, qu’ils ont effacé dans leurs cerveaux le fait que je suis Professeur Titulaire, exactement comme eux et que j’ai donc l’autorité académique, pédagogique et scientifique pour mettre en œuvre des programmes de formation, dans un cadre qui mobilise une expertise nationale et internationale de très haut niveau.
Il y a quelques temps, j’avais eu l’honneur d’être reçu par un collègue Ministre de l’Enseignement supérieur. Un collègue professeur, que je connais depuis plusieurs décennies, dans toutes nos vies antérieures. Au cours de l’échange, il m’expliqua qu’il envisageait mettre en place une nouvelle politique visant à interdire aux enseignants-chercheurs du public d’aller enseigner dans les établissements privés. C’était, là, d’après lui, la cause du déclin de l’Université publique au Gabon, car les enseignants-chercheurs abandonneraient le service public pour se précipiter dans les établissements privés, où ils sont payés comme vacataires.
De tels propos, venant d’un éminent collègue, m’ont franchement stupéfait. Comment cela pouvait être possible qu’un collègue, qui a officié partout, au Gabon, en Afrique et même en France, pour donner des cours et encadrer des étudiants dans différentes universités publiques et privées pouvait en être arrivé là ? J’ai essayé, autant que possible, de lui expliquer que sa connaissance des problèmes de l’Université gabonaise était, sinon lapidaire, du moins carrément mauvaise. Il gagnerait donc, pour définir et mettre en œuvre son plan d’action, à écouter les responsables des différents syndicats, le SNEC et la FRAPES, notamment, qui vont lui dire ce qu’il faut sur tous les problèmes qui minent le bon fonctionnement de l’Université gabonaise.
J’ai expliqué au Ministre, sans aucune certitude qu’il ait même essayé de me comprendre, que dans tous les pays du monde, y compris le Cameroun voisin, un enseignant-chercheur permanent d’une université publique a parfaitement le droit, la liberté devrais-je dire, d’aller et venir et d’officier où il veut, où il est invité, pour assurer des enseignements et encadrer des étudiants. Tout cela, bien sûr après avoir assumé et à condition d’avoir assumé ses charges et responsabilités dans son université. Il en est, ainsi, des USA, du Canada, de la France, … parmi les meilleurs exemples dans le monde. Le Ministre m’a regardé,comme s’il avait affaire à un fou.
Dans ce texte, j’ai montré, en reprenant à mon compte des éléments du ranking 2024 de THE, que les meilleurs Université au monde sont privées. Les nostalgiques de l’Université publique dominante au Gabon vont être de plus en plus tristes, chaque année, en voyant les établissements privés monter en puissance. Le processus va, évidemment, s’accélérer, si les pouvoirs politiques ne comprennent pas l’urgence de booster l’Université publique, qui croule sous des difficultés existentielles de plus en plus évidentes.
La croissance continue des étudiants, l’obsolescence programmée d’une offre publique qui peine à se renouveler va faire que l’Université publique va laisser progressivement place au modèle du privé, plus proactif, plus efficace, plus cohérent, plus dynamique et plus souple pour s’adapter aux contextes divers et variés, en créant des filières sélectives, en adéquation avec l’évolution de l’économie gabonaise.
Qu’on ne s’y méprenne, la seule force de l’Université publique aujourd’hui, ce sont ses ressources humaines, ses Maîtres-assistants, ses Maîtres de conférences et ses Professeurs titulaires, qui font encore défaut dans la plupart des établissements privés, qui n’ont pas ou que très peu d’enseignants-chercheurs permanents. Mais, cette situation ne va pas s’éterniser.
- POUR NE PAS CONCLURE
Je voudrais commencer cette non-conclusion par trois remarques d’importance, afin de m’éviter tout malentendu et étouffer, dans l’œuf, l’agitation des courtisans :
(1) Je précise, pour m’en réjouir, que l’organisation de ces Assises du LMD était absolument nécessaire et que nous devons, toutes et tous au sein des institutions universitaires publiques et privées du pays, présenter nos vives et chaleureuses félicitations au Ministre de tutelle pour cette initiative.
(2) Je conteste dans ce texte et dans mon ouvrage à venir (Idiata, en préparation), une recommandation. Je ne conteste donc pas l’ensemble des recommandations des Assises du LMD des 18, 19 et 20 mars 2024 au Gabon.
(3) En dehors de le belle trouvaille inspirée par le Professeur Alain ONDOUA, ces Assises du LMD n’ont rien apporté de nouveau. Toute cette litanie de recommandations, c’est du déjà entendu. Le Ministre Séraphin MOUNDOUNGA avait, en 2010-2011, commandité la première évaluation de la mise en œuvre du LMD au Gabon, trois ans après sa généralisation. C’était déjà les mêmes conclusions; mot pour mot, les mêmes recommandations. Ce qu’il faut souhaiter, cette-fois, c’est que l’Etat joue effectivement sa partition, en donnant aux établissements, publics comme privés, les moyens conséquents de mettre en œuvre et de manière efficiente, le système LMD prévu par et dans les Directives CEMAC.
Comprendra, qui voudra et qui pourra !
Les absents ont toujours tort. Ce vieux dicton est bien connu et souvent brandi par toutes celles et tous ceux qui veulent imposer leur trouvaille, même lorsque celle-ci n’est pas crédible.
Je conçois qu’on me l’oppose, même si je ne l’accepterai pas. Ce, d’autant plus, que pour une grande messe comme les Assises du LMD, dont l’objectif annoncé était de faire le bilan de l’application du LMD au Gabon et d’identifier les correctifs nécessaires, les premiers concernés que sont les patriciens du LMD dans les établissements publics et privés du Gabon auraient dû en être les principaux acteurs-experts et peut-être même les seuls, au moins pour une première phase dite nationale. C’est à une seconde phase, que l’expertise internationale aurait été mobilisée pour aider à concevoir les outils de correction identifiés et retenus dans les recommandations, en s’inspirant des modèles qui marchent le mieux, ailleurs en Afrique, en Europe, en Amérique et en Asie.
Qu’on ne s’y méprenne. Je ne conteste pas la présence des collègues des universités étrangères, qui ont été mobilisés par le Ministère pour apporter leurs témoignages et leurs savoirs, en guise de partage d’expériences. A cet égard, la contribution du Professeur Claude LISHOU, de l’Université Cheikh Anta Diop du Sénégal, sur l’assurance qualité dans l’enseignement supérieur, est une merveille de pertinence.
Mais, encore une fois, et pour éviter toute polémique inutile avec notre très cher collègue Alain ONDOUA, ou avec un tout autre collègue du Gabon ou de l’étranger, ce que je n’accepte pas dans cette affaire, c’est le fait qu’un collègue substitue sa toge d’agrégé avec une soutane de marchand d’évangile. C’est, comme si le Pape François se moquait de l’Eglise catholique. Même au pays des aveugles, ce genre de chose est inacceptable.
Pour ne pas conclure donc, je voudrais en appeler à tous, pour dire que le contexte gabonais post 30 août 2023 impose, plus que par le passé, que les responsables investis de l’autorité de l’Etat adoptent systématiquement une démarche inclusive et participative de tous les acteurs sectoriels. L’objectif étant de restaurer notre pays.
Or, cet objectif ne peut être atteint qu’avec la mobilisation et la contribution de toutes et tous autour d’un projet commun. Sur cette base, je reste convaincu que la problématique des établissements privés d’enseignement supérieur n’a pas trouvé son épilogue avec la recommandation cynique des Assises du LMD des 18, 19 et 20 mars 2024 inspirée par le « druide » Alain ONDOA.
REFERENCES CITEES DANS LE TEXTE :
Allison, Graham, (2015), « The Thucydides Trap: Are the U.S. and China Headed for War? », The Atlantic, le 24 septembre 2015.
Allison, Graham, (2019), Vers la guerre : la Chine, et l’Amérique dans le piège de Thucydide ? Paris, Odile Jacob.
Zajec, Olivier, (2017), « Le piège de Thucydide », Le Monde diplomatique, 1er octobre 2017.
POUR CITER CE TEXTE :
IDIATA, Daniel Franck, (en préparation), Lecture critique des recommandations des Assises du LMD au Gabon, 18-20 mars 2014 : essai sur une réforme encore et toujours aussi mal comprise. A paraître aux Editions Universitaires Gabonaises.
Daniel Franck IDIATA
Professeur Titulaire, CAMES 2011
Enseignant-chercheur à l’Université Omar Bongo
Président fondateur de l’EM GABON-Université
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