Boulevard qui regroupe plusieurs administrations des régies financières à Libreville © Gabonactu.com
Un audit réalisé conjointement par l’administration et les représentants des syndicats des régies financières aurait révélé que les fonctionnaires fantômes percevraient illégalement près de 2 milliards de FCFA par mois dans les régies financières, a confié à Gabonactu.com une source très proche du dossier.
L’audit concernait les effectifs et les primes versées en 2018. Il s’est déroulé dans toutes les administrations du Budget et des Comptes Publics, de l’Economie et celles des Hydrocarbures.
Durant la période, des représentants des syndicats des régies financières ont sillonné tout le pays pour recenser chaque agent à son poste de travail. Chaque équipe d’auditeurs étaient composée des partenaires sociaux (syndicats) et des agents administratifs.
L’audit a permis de relever des criardes anomalies entre les données réelles et les données déclarées.
« Il y a des antennes où le nombre de travailleurs déclarés sur le papier était 30. Mais sur le terrain, on a trouvé 5 ou 6 agents », a confié un des agents ayant participé à cette opération.
« Le gonflement des effectifs est un tour de manège utilisé par des puissants de l’administration pour se faire du beurre à l’occasion du paiement de la Prime spéciale d’incitation à la performance (PSIP, les fameux fonds communs) », explique l’agent.
833 présumés fonctionnaires fantômes
Selon le décompte effectué par les auditeurs, les quatre ministères concernés totalisaient en 2018 quelques 9 059 agents.
« Sur cette, il y a des doublons, des homonymies, des surclassés et des cas litigieux », affirme un agent des mines qui a également participé à l’opération de dépoussiérage du fichier.
Les auditeurs ont formellement identifié 833 cas litigieux. Ces 833 présumés fonctionnaires fantômes percevaient la coquette somme de 1,8 milliard de FCFA.
L’une des recommandations des auditeurs était la mise sur bon de caisse de tous les agents pour espérer débusquer les bénéficiaires de cette manne. Les auditeurs suggéraient la possibilité de régularisation de chaque agent après avis du comité technique (Administration/Partenaires sociaux) suivant les justifications données par les agents concernés.
« Mais à la surprise des partenaires sociaux, l’administration va procéder de manière unilatérale à la distribution desdits bons de caisse au mépris de la composition du comité technique mis en place. Mieux, parmi les actes administratifs sollicités lors de ces opérations d’audit figurait l’attestation de présence au poste. Les partenaires sociaux ont relevé une aberration. Alors que ce document est individuel et que l’audit était intuitu personae, une administration et non des moindres s’est permise d’établir des attestations de présence collectives pour les agents sensés exercer dans ses services. En procédant ainsi, cette administration avait certainement l’intention de dissimuler les effectifs de ses services qui étaient largement en dessous de ceux déclarés », déplore un syndicaliste des impôts.
« Nous insistons que la publication des conclusions de cet audit permettra assurément à l’Etat de réaliser des économie », avait soutenu le porte parole de la Fédération des collecteurs des régies financières (FECOREFI), Sylvain Ombindha Talheywa III lors d’un entretien accordé à Gabonactu.com le 20 juillet.
Les conclusions de cet audit existent mais n’ont jamais fait l’objet d’une restitution afin d’être validées. Depuis le 13 juillet, la FECOREFI qui regroupe quatre administrations (Douanes, Trésor, Impôts et hydrocarbures) a déclenché une grève générale illimitée pour entre autre exiger la publication des résultats de cet audit. L’administration semble répondre par le silence.
Instructions de Noureddin Bongo Valentin
La grève se poursuit avec fort heureusement un service minimum assuré par les chefs de services et les directeurs. Les positions restent tranchées. Les négociations piétinent malgré un courrier du Coordinateur général des affaires présidentielles, Noureddin Bongo Valentin datant du 27 août 2020 ayant instruit le ministre de l’Economie et de la relance économique d’ouvrir urgemment des négociations avec les responsables de la FECOREFI.
Vendredi, le Groupement syndical Economie, Budget et Pétrole (GSEBP) dirigé par Célestin Essono Ndoutoume a appelé à la paix des braves pour sauver l’économie nationale en dérive.
Le GSEBP a prié la FECOREFI et le ministre de l’Economie de mettre un peu d’eau dans leur vin et de penser « Gabon d’abord » en acceptant de s’asseoir sans conditions sur la table des négociations car les pertes sont « abyssales » et compromettent les chances de la relance de l’économie du pays.
« Nous saluons l’élan patriotique des syndicats qui font preuve de réalisme en tenant compte de la situation difficile que le pays traverse », a réagi de son côté le ministère de l’Economie cité par Radio France internationale (RFI).
Depuis la lettre du Coordinateur général des affaires présidentielles, les négociations n’ont pas connu un coup d’accélérateur, selon le porte-parole de la FECOREFI.
Camille Boussoughou