Depuis plusieurs semaines, les habitants de Libreville et de ses environs vivent au rythme des coupures d’électricité, parfois quotidiennes, souvent imprévisibles. Si le phénomène n’est pas totalement nouveau, son intensité et sa fréquence suscitent désormais des inquiétudes. La cause ?
Des retards techniques et des conditions climatiques défavorables et un retard technique dans le raccordement au réseau SEEG d’une nouvelle unité de production d’électricité de 150 MW. La conjonction de ces 2 facteurs met à rude épreuve le système électrique de la capitale gabonaise. Une nouvelle centrale thermique attendue… mais toujours pas opérationnelle.
Au cœur de cette crise, un projet ambitieux qui tarde à se concrétiser. La nouvelle centrale thermique flottante, censée injecter 150 mégawatts supplémentaires dans le réseau électrique, n’a toujours pas été raccordée. Sa mise en service a pris du retard. Actuellement en phase de tests, la centrale ne peut pas encore fonctionner à plein régime. Résultat : le système électrique tourne avec une capacité réduite, alors que la demande reste forte dans une ville en pleine expansion.

Des barrages hydroélectriques à sec : la pluie se fait attendre
Parallèlement à ce retard technique, la nature n’a pas été clémente. La saison des pluies a été exceptionnellement faible cette année dans la vallée de la Mbè, région stratégique pour la production hydroélectrique du pays. Conséquence directe : les barrages de Tchimbélé et Kinguélé, qui fournissent ensemble près de 40 % de l’électricité consommée dans le Grand Libreville, fonctionnent actuellement bien en dessous de leur capacité.
Le barrage de Tchimbélé a atteint un niveau historiquement bas : 515,98 mètres, soit près de 15 mètres en dessous de son niveau normal d’exploitation (531 mètres), et même en dessous du seuil critique fixé à 517 mètres. Une situation inédite qui menace sérieusement la continuité du service électrique dans la capitale.

Face à ce double défi – retards techniques et absence de pluies dans la vallée de la Mbè – la Société d’Énergie et d’Eau du Gabon (SEEG) a réagi en mettant en place un programme de délestage rotatif. Il s’agit d’une stratégie de gestion de crise visant à répartir équitablement l’électricité disponible. Certaines zones sont volontairement privées de courant pendant quelques heures, puis réalimentées, pendant que d’autres quartiers sont à leur tour délestés.
« Ce système, bien qu’impopulaire, permet d’éviter un effondrement du réseau, un ‘blackout’ qui serait bien plus difficile à gérer », explique Cyr Roland Abaghe Essone, Directeur Exploitation Electricité. Un comité de crise a également été activé pour suivre en temps réel l’évolution de la situation, coordonner les réponses entre les acteurs du secteur et prendre les décisions nécessaires pour limiter l’impact sur les usagers.
Vers une sortie de crise… mais à quelle échéance ?
L’espoir d’un retour à la normale repose aujourd’hui sur deux facteurs principaux :
La mise en service complète de la centrale thermique flottante : si les tests se poursuivent sans accrocs, celle-ci pourrait commencer à injecter ses 150 MW dans le réseau dans les prochaines semaines ;
Le retour des pluies : la situation des barrages ne s’améliorera durablement qu’avec des précipitations abondantes, susceptibles de rétablir les niveaux d’eau nécessaires au bon fonctionnement des turbines hydroélectriques.
En attendant, les habitants s’adaptent. Dans les foyers, les commerces et les administrations, chacun s’organise comme il peut. Groupes électrogènes, panneaux solaires : les solutions alternatives fleurissent, mais restent souvent inaccessibles aux ménages les plus modestes. Les coupures prolongées affectent aussi les petites entreprises, déjà fragilisées par un contexte économique difficile. Alors que les températures grimpent et que les pluies tardent à revenir, la population attend des solutions rapides. Car au-delà du confort quotidien, c’est toute la vie économique et sociale de Libreville qui est impactée par cette crise nouvelle énergétique
Camille Boussoughou