A près d’une heure et un quart de navigation sur le fleuve Ogooué, le district d’Aschouka, Canton Ogooué aval près de Lambaréné, département de l’Ogooué et Lacs, province du Moyen Ogooué (centre), l’école de la localité tient sur un bâtiment suranné à cycle primaire complet ou presque. Ceux des élèves de passage en classe de 6ème année (CM2) sont transférés sur la capitale provinciale, à la charge de leurs familles respectives bien sûr, qui le peuvent cela s’entend, pour y poursuivre leur scolarité et passer le Brevet d’études primaires (CEP) pour accéder au secondaire.
Une matinée ordinaire dans la cour de l’école d’Aschouka, en cette fin de trimestre de l’année scolaire 2024-25, où une trentaine de bambins, inscrits dans les classes allant du CP1 (1ère année) au CM1 (5ème année), profitent de l’instant de récréation, avec l’insouciance caractéristique des enfants en bas âge, attirés par le jeu et le bonheur apparents.
Pourtant, dans un coin de la cour, esseulé, Alexis Ponga, Directeur de l’école, le regard hagard et perdu, semble avoir les raisons de se faire des soucis pour le fonctionnement régulier de cet établissement scolaire, dans ce ‘’bled’’ qu’il croit ne pas compter sur la carte scolaire régionale et nationale, du moins à en juger par ses ‘’lamentations’’ et ‘’supplications’’.
« Le premier écueil concerne la mobilité pour partir d’ici à destination de Lambaréné, où tout se passe, où tout se trouve et se décide. C’est la croix et la bannière pour trouver une embarcation et le coût du transport est un autre casse-tête, 10 000 Francs CFA, la tête, sans bagages », s’est le Directeur de l’école d’Aschouka.
Le plus cocasse c’est que le Directeur est aussi le seul chargé de cours dans cette école primaire d’Aschouka qui ne dispose que de trois (3) salles physiques pour cinq (5) classes pédagogiques, du CP1 au CM1. Un brassage de niveaux et d’enseignements qui créent forcément de la cacophonie et du cafouillage aux heures de cours et lors des évaluations.
« Impossible d’être efficace. La priorité ce sont les élèves de 5ème année parce que c’est le miroir de l’établissement. Ils ne doivent pas aller nous faire la honte là-bas à Lambaréné, au CM2 et au CEP. Pour les classes inférieures, je dois vous avouer que je fais dans le saupoudrage, dans le remplissage. Je fais le travail à minima parce que seul, je ne peux respecter ni les programmes ni les exigences pédagogiques », a confessé Alexis Ponga.
La motivation n’y est pas non plus, « les salaires sont médiocres et nous sommes en réalité des agents du Conseil départemental donc la motivation ne suit pas en termes de salaire. Je formule le vœu ardent, avec tous mes pairs des écoles du Département de l’Ogooué et des Lacs, voire au-delà, d’être intégrés à la fonction publique », plaide-t-il dans une supplication adressée aussi bien aux plus hautes autorités de la transition et aux opérateurs économiques de la région qu’aux filles et fils originaires de la contrée.
La consolation du Directeur de l’école, les résultats plus que probants qu’il obtient année après année. « J’ai fait 100% au CEP l’année dernière », s’est-il réjoui. Mais figurez vous que cette année et à cette date, je n’ai même pas encore réceptionné les manuels ‘’super efficace’’ et autres supports didactiques, pourtant arrivés à Lambaréné depuis un moment ai-je appris », a-t-il conclut.
Alph’-Whilem Eslie