A croire que le PDG ne veut nullement s’émanciper de son passé sombre pour épouser l’ère du temps. On s’attendait à tout, sauf à voir figurer dans son bureau transitoire une relique dont la tronche est un cauchemar pour de nombreux Gabonais qui ont été désabusés par un système politique dont il est un des gourous.
On a bêtement cru que, en perte de vitesse, cette formation politique capitaliserait les erreurs du passé afin qu’elle renaisse sous un jour nouveau. En voulant refonder cette vielle décharge politique, visqueuse par ses organes tentaculaires dignes d’un Etat policier, on pensait qu’elle devait au préalable se débarrasser de ses scories ayant lourdement douché son image du fait d’une gestion hasardeuse de la chose publique.
Exposer sur la place publique cette momie politique que l’on croyait pourtant soigneusement rangée dans un sarcophage, est une provocation de trop.
Rien qu’à regarder le spécimen, il réveille de vieux souvenirs d’un pourvoir brutale bête et méchant qui a marché sur des cadavres au nom de ses intérêts égoïstes. La « Tortue » de Bikélé, alias Paul Biyoghe Mba, a donc réapparu et en première ligne. Kie !
Le Congrès extraordinaire attendu par les quelques militants encore présents dans les rangs, va sans doute marquer la rupture avec ces requins qu’on doit, à l’instar du Distingué camarade, ramener au rang de simples militants de base, que cela leur plaise ou non. Sinon ils apportent quoi en terme de plus-value, si ce n’est raviver des frustrations secrétées depuis plus d’un demi-siècle de mal gouvernance ?
Le nouveau format du parti, s’il veut conserver une miette de crédit et survivre dans un environnement politique gagné par une adversité dévorante, doit opérer une chirurgie esthétique.
Au Togo, le Rassemblement du peuple togolais (RPT), face à un héritage politique trop lourd, a dû se muer en Union pour la République (UNIR) ; au Cameroun, l’Union nationale camerounaise (UNC), parti d’Ahmadou Ahidjo, est devenu le RDPC. En France, Marine Le Pen, héritière du parti de son père, le Front National (FN) dont la tonalité dégageait de fortes émanations racistes, pour faire dans l’embrouille, s’était résolue à opérer un rhabillage identitaire pour devenir finalement le Rassemblement National (RN).
Même s’il est vrai que ce n’est qu’un habillage, un trompe l’œil me diriez-vous, il est surtout ici question de faire oublier le PDG à l’évocation duquel, dans l’imaginaire des Gabonais, sonne telle une torture psychologique.
Sinon, si rien n’est fait dans le sens d’une refondation en profondeur, à l’allure où les défections s’enchainent dans ses rangs sur fond d’OPA lancées par ses adversaires, combinées à son image déjà largement entamée, au vu de cette érosion qui prend de l’ampleur, il y a le risque que le PDG atteigne, à terme, la taille de petites formations politiques confidentielles tels le Mouvement d’émancipation socialiste du peuple (MESP) de Victor Mouang Mbading ou le Front Démocratique et Culturel (FDC) de Jean Claude Quentin Ben Mongaryas. Ce qui entrainerait, et c’est bien dommage, l’effondrement de tout l’édifice PDG.
Les financements
La difficulté à laquelle va se heurter le PDG qui n’a plus sa planche à billets depuis l’arrivée des putschistes, ce sera la question du financement de son fonctionnement. Ses militants habitués à l’argent facile qui arrivait de partout via des circuits sinueux, n’ont pas la culture des cotisations pour renflouer les caisses du parti. Pour nombre d’entre eux, leur parti est une banque, un office d’emplois ; une usine à fabriquer des ministres, des Directeurs généraux, voire une juridiction spécialisée dans l’attribution des passe-droits et autres certificats d’impunité. Nombreux, en effet, s’encartaient pour ça et non par conviction idéologique. Je doute fort qu’ils soient nombreux à avoir jeté un coup d’œil dans les pages du manifeste de leur parti.
Il est vrai que le PDG a survécu aux différents séismes qui auraient pu l’emporter, celui par exemple consécutif à l’assassinat, le 23 mai 1990, de l’opposant Joseph Rédjambé au sortir de la conférence nationale. L’on se souvient que plus personne ne pouvait parier sur sa survie, se réclamer de cette formation politique était devenu un exercice périlleux. Elle n’attendait plus que son extrême onction et que sa mort soit actée.
Tous les cadres ou presque de ce parti, y compris son Président fondateur Albert Bernard Bongo, avaient abandonné le navire pour prendre le maquis.
Il avait fallu que Jacques Adhiaenot sorte du bois et prenne, avec un courage suicidaire, le contrôle du navire qui dérivait vers des horizons inconnus.
Bongo le grand manitou, depuis sa planque dorée du bord de mer, donnait des ordres afin de sauver encore ce qui pouvait l’être. A coup de milliards de francs CFA, les choses entrèrent dans l’ordre et c’est ainsi que le PDG fut sauvé du naufrage.
Aujourd’hui les fondateurs du PDG ne sont plus de ce monde pour, comme par le passé, remettre le parti sur les rails. Les héritiers, d’un côté les fans d’Albert Bernard et de l’autre les obligés d’Alain-Bernard eux qui ont longtemps été biberonnées puis sevrés du lait parental, doivent désormais prendre les choses en mains.
Ce n’est pas tout que d’appeler à la dissolution du PDG comme je l’entends ça et là, les bannir, les ostraciser tels des pestiférés, c’est injuste, déloyal et inélégant, voire antidémocratique. Ce qu’on doit attendre d’eux c’est qu’ils comprennent simplement qu’aucune condition n’est permanente, une simple leçon de vie…
Timothée Mémey
NB : cette chronique ne reflète pas le point de vue de la rédaction respectueuse de la liberté d’expression