L’affaire du prophète Emmanuel Ndzoma, qui avait suscité grand bruit dans notre pays et au-delà pendant en septembre 2022, vient de connaître son épilogue.
Il faut rappeler que le prophète Emmanuel Ndzoma et Samba Nestor avaient été placés sous mandat de dépôt le 9 septembre 2022, pour escroquerie, association de malfaiteurs, pratique du charlatanisme, faux et usage de faux, défaut de carte de séjour. Délits prévus et punis par les articles 193, 210 et 301 du Code Pénal gabonais.
Quant aux autres collaborateurs, Mbele Stessie et Wade Idriss, ils avaient bénéficié d’une mise en liberté provisoire le même jour.
Après 5 mois de détention préventive à la Prison Centrale de Libreville, Emmanuel Ndzoma avait bénéficié d’une mise en liberté provisoire le 17 février 2023.
Cependant, l’affaire suivait toujours son cours normal au niveau du juge d’instruction. Emmanuel Ndzoma, bien qu’en liberté provisoire, pouvait encore être arrêté à tout moment. Le suspens était donc permanent.
Au terme de l’instruction, le 03 février 2023, le Juge qui a instruit l’affaire a rendu une ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi devant le Tribunal Correctionnel contraire aux réquisitions du Parquet de la République.
(PS: en procédure judiciaire, l’ordonnance est une décision prise par un juge. Le juge statue seul, dans certains cas, dans son cabinet, donc hors de l’audience publique.)
Autrement dit, il n’y a pas d’éléments probants capables de justifier les poursuites judiciaires contre Emmanuel Ndzoma.
Mais son collaborateur, Nestor Samba doit être jugé par le Tribunal Correctionnel pour faux et usage de faux et défaut de carte de séjour.
Cependant, le Parquet de la République n’étant pas d’accord de la décision du juge d’instruction, notamment celle du non-lieu partiel, va alors interjeter appel le 07 février 2023, conformément aux dispositions de l’article 171 du Code de Procédure Pénale, qui précise que le Procureur de la République a le droit d’interjeter appel devant la Chambre d’accusation contre toute ordonnance du juge d’instruction.
C’est ainsi que le dossier a été transmis à la Chambre d’accusation.
(PS: Cette Chambre veille au bon déroulement de l’instruction, au respect des procédures et des délais. Elle juge des appels contre les décisions du juge d’instruction. C’est la juridiction d’instruction du second degré. Elle siège à huis clos).
Sur le délit d’escroquerie:
Le Juge d’instruction explique que, selon l’article 301 du code pénal gabonais, l’escroquerie est caractérisée par des manœuvres frauduleuses, par l’emploi des fausses qualités, de faux noms, pour persuader l’existence d’un pouvoir, d’un crédit imaginaire ou l’existence de fausse entreprise dans le but de se faire remettre des sommes d’argent ou des obligations par autrui.
Et que les sommes d’argent remises par les fidèles, notamment l’argent remis par dame Ulda Mbenga, constituent des offrandes, des dons et des participations pour la construction de l’église.
Qui plus est, le Juge ajoute que cet argent n’a jamais été remis en main propre à Emmanuel Ndzoma ni à Nestor, mais au service comptable de l’église. Dame Mbenga confirme que son argent remis (60.000 fcfa au total) n’était pas pour recevoir une guérison, une prédiction ou autre mais c’était exclusivement pour la construction de l’église et de la croisade .
Sur la pratique du Charlatanisme :
La pratique du charlatanisme est définie en droit comme toute action prétendant publiquement, de manière frauduleuse, disposer des compétences médicales les proposant à des individus des remèdes illusoires ou insuffisamment éprouvés en les présentant comme salutaire et sans danger.
Selon le juge, tout au long de l’instruction, aucune preuve matérielle caractérisant la sorcellerie ou le charlatanisme au sens de la loi n’a été apportée. Et il n’y a eu aucune entente entre Ndzoma et ses collaborateurs inculpés, encore moins avec dame Mbenga.
Tout au long de la procédure, pour la manifestation de la vérité, le juge d’instruction a convoqué et entendu plusieurs personnes. Il ressort donc qu’Emmanuel Ndzoma et ses collaborateurs inculpés ne se sont jamais vantés détenir une potion magique, un remède, d’êtres des guérisseurs ayant proposé des remèdes illusoires à leur victime.
Sur le faux usage et de faux et défaut de carte de séjour :
Les faits sont suffisamment établis à l’encontre de Nestor Samba. En effet, c’est sur la base des informations erronées que ce dernier s’est fait établir des documents de l’administration gabonaise, attestant sa nationalité gabonaise alors qu’il est Congolais de Kinshasa. Il a utilisé ses documents en sachant que lesdites pièces étaient fausses. Il tombe donc sur le coup de la loi, et il n’a pas de carte de séjour. Toutefois, il bénéficie toujours de la Présomption d’innocence.
Le 22 juin 2023, La Chambre d’accusation, après examen minutieux du dossier, a confirmé définitivement et entièrement l’ordonnance non lieu-partiel et de renvoi devant le Tribunal Correctionnel du juge d’instruction.
Seul Nestor Samba sera jugé par le Tribunal Correctionnel pour faux et usage de faux et défaut de carte de séjour.
Il faut également préciser que, lors de l’audience de la chambre d’accusation, le Parquet Général avait aussi requis pour le non lieu-partiel.
Le Prophète Emmanuel Ndzoma défendu par Mes Jean-Paul Moumbembé et Pie Makanga Avocats au Barreau National du Gabon, a passé 5 mois en prison. Son église est toujours fermée jusqu’a ce jour .
Sa famille biologique et celle spirituelle ont également été moquées sur les réseaux sociaux. Le jeune prophète avait été jeté à la vindicte populaire, son image largement entachée auprès de l’opinion. Mais la justice gabonaise vient de le blanchir définitivement après avoir passé 5 mois en prison.
Qui va réparer le préjudice qu’Emmanuel Ndzoma a subi ?
Il est aussi temps que le Ministère de l’Intérieur puisse désormais lever la mesure portant fermeture de l’église nommée “la Synagogue.” La Justice a rendu sa décision et force reste à la loi.
SOS Prisonniers Gabon, souhaite aussi qu’Emmanuel Ndzoma, qui a passé un séjour en milieu carcéral, œuvre désormais pour ces personnes incarcérées, abandonnées, qui ont soif de justice et sont dans des mauvaises conditions de détention. Car nous espérons que, si Dieu a permis qu’Emmanuel Ndzoma puisse faire un tour en prison, cela n’est peut-être pas en vain.
Source : SOS Prisonniers Gabon, pour l’Indépendance de la Justice.