Libreville, Gabon (Gabonactu.com) – Gabonactu.com diffuse pour ses lecteurs l’intégralité de la déclaration de la coalition de Jean Ping consacrée à la crise économique qui frappe le Gabon, les sanctions attendues du parlement européen contre le pouvoir d’Ali Bongo Ondimba et le coût des CAN 2012 et 2017 jugés trop exorbitant (863 milliards de FCFA).
COALITION POUR LA NOUVELLE RÉPUBLIQUE DECLARATION DU 27 JANVIER 2017
Le GABON est plongé aujourd’hui dans une crise profonde, multiformes et particulièrement préoccupante. Au plan économique, elle se caractérise par « une détérioration des perspectives et un accroissement des risques » dans « un contexte difficile », selon le Rapport GABON du Fond Monétaire International, de Mars 2016.
Au plan social, elle est marquée par des grèves récurrentes dans tous les secteurs d’activité du pays. Les inégalités s’accentuent, le taux de chômage avoisine les 35% de la population active, la pauvreté absolue touche plus de 34% de la population et la précarité s’amplifie, affectant toutes les couches sociales, dans toutes les régions du pays. Les fermetures d’entreprises, de plus en plus nombreuses, résultant principalement de la dette de l’Etat non honorée et de la baisse des activités dans le secteur pétrolier, amplifient encore davantage les tendances inquiétantes soulignées précédemment.
Le fossé s’élargit chaque jour un peu plus, entre riches et pauvres, contribuant ainsi à l’émergence d’une société clivée, où les égoïsmes d’une minorité l’emportent sur le souci du bien commun. Sur le fondement de cette crise sociale avérée et sciemment minimisée par le pouvoir, une crise politique et institutionnelle, latente depuis 2009, s’est s’installée et s’est enracinée, pour atteindre son paroxysme avec les démissions de nombreux parlementaires et du Président de l’Assemblée Nationale en 2016.
Cette crise s’est traduite également par une instabilité gouvernementale matérialisée par les changements répétés de Premier ministre et de gouvernements. Et pour ajouter à la confusion, on note par ailleurs, de nombreuses démissions de cadres du parti au pouvoir, ainsi que des purges effectuées dans l’Administration et les forces de défense et de sécurité. Suite à l’élection présidentielle du 27 août 2016, et à la confiscation du processus électoral, dans le but d’empêcher la proclamation de la victoire de Jean PING, candidat élu par le peuple gabonais, le pouvoir sortant va organiser une violence d’Etat, ponctuée notamment par des arrestations arbitraires et des assassinats et ce, uniquement pour assurer son maintien.
Ce parti pris pour la violence, unique dans l’histoire de notre pays, n’a fait qu’intensifier la crise, avec les répercussions politiques, économiques et sociales que nous observons, parachevant ainsi l’effondrement des fondamentaux de notre vivre ensemble. Cette situation n’est donc pas simplement due à « une poussée de vents contraires ». Elle résulte aussi et surtout des errements d’un pouvoir en place depuis 2009, composé pour l’essentiel d’amateurs à la moralité douteuse, à l’incompétence manifeste, à la cupidité avérée et dont l’amour pour le pays reste à démontrer.
Ce pouvoir, qui s’appuie sur une idéologie sectaire et des factions, parmi les plus obscurantistes de la société gabonaise, va très rapidement, par sa légèreté et son cynisme, conduire le pays vers une faillite inéluctable, en désorganisant l’Etat par une gestion scabreuse des finances publiques, un pillage en règle des ressources budgétaires, la précarisation des agents publics, auxquels il convient d’ajouter le harcèlement multiforme des entreprises privées. Dans ce contexte, le peuple Gabonais qui a fait le choix des valeurs de l’Etat de droit, de la démocratie, de la solidarité et des droits humains, va développer un sentiment naturel de rejet vis à vis de ce pouvoir.
Ce sentiment va se traduire par un désaveu cinglant du président sortant, candidat à sa propre succession, lors de l’élection présidentielle d’août 2016 et par l’élection incontestable du candidat de l’opposition, Jean PING. Depuis lors, l’opposition au pouvoir s’organise, la «Résistance » qu’incarne la Coalition de l’Opposition pour la Nouvelle République est en place et s’active pour faire reconnaître la vérité des urnes, la victoire de Jean PING et la souveraineté du peuple gabonais.
C’est fort de cette victoire, du soutien du peuple gabonais dans son écrasante majorité, du soutien de la Communauté internationale et pour préserver la paix et la stabilité, que la « Résistance » dénonce avec fermeté le climat de terreur qui perdure dans notre pays, alors même que l’action de cette « Résistance » est légale et pacifique.
Dans ce cadre, le rapport publié le 12 décembre dernier par la Mission d’observation électorale de l’UE fait état de graves anomalies et confirme la fraude électorale. Il conclue en effet, je cite : « Ces anomalies mettent en question l’intégrité du processus de consolidation des résultats et du résultat final de l’élection ». Le Parlement européen se réunira à Bruxelles le 1er février prochain pour débattre de la situation du Gabon.
Les Gabonais sont en attente de mesures politiques, fortes visant à contraindre le régime gabonais actuel et à rétablir la vérité des urnes, notamment l’arrêt de la coopération économique et financière, des sanctions ciblées, le boycott diplomatique. En outre, le dossier deposé à la Cour Pénale Internationale, le 15 décembre 2016 prouve l’existence de crimes contre l’humanité perpétrés par les autorités gabonaises. Ce dossier avance normalement. A ce propos, les criminels d’hier et ceux de demain doivent comprendre que le temps de l’impunité est bel et bien terminé.
Incapable de faire face à cette crise profonde, la junte au pouvoir s’obstine par la propagande, le mensonge et le dénie des réalités quotidiennes endurées par nos compatriotes, à cultiver l’illusion de la stabilité, de la paix et d’une prétendue égalité des chances. Or et d’évidence, la prospérité et le partage équitable de la richesse nationale qui doivent sous-tendre une réelle stabilité et une paix véritable, gages de notre vivre ensemble, ne sont pas au rendez-vous. Alors se pose avec acuité et dans ce contexte la question de la crédibilité du pouvoir illégitime en place, quant à la capacité de monsieur ALI BONGO et de son équipe à sortir le pays de la crise, conformément au choix exprimé par le peuple gabonais le 27 août dernier.
Cette question est d’autant plus justifiée que monsieur Ali BONGO et ses affidés s’exonèrent allègrement de toute éthique et de toute règle en matière de gestion de la chose publique.
En effet, la lecture des différentes lois de finances depuis 2010 a achevé de convaincre le peuple Gabonais quant aux mauvais arbitrages et aux mauvais choix des priorités budgétaires. En réalité, la gestion du pays déléguée par monsieur Ali Bongo à ses amis, n’a eu pour but que leur enrichissement collectif et la promotion de son pouvoir personnel. Ainsi, nous notons dans la loi de finances 2016 par exemple, que les crédits alloués à l’Education Nationale baissent de 6 %, ceux de l’Enseignement Supérieur de 10 %, et ceux affectés à la Santé de 42 %. A contrario, les crédits de la Défense connaissent une augmentation importante à hauteur de 19 % et ceux de la Communication augmentent de 4 %. En accordant la priorité à l’Armée et la Communication, le Gouvernement a fait délibérément le pari de se maintenir au pouvoir et de parvenir à l’émergence par la force des armes et par la propagande.
Dans la même logique, l’organisation en 2012 et 2017 de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) coutent d’ores et déjà au contribuable gabonais la somme de 863 milliards de FCFA, soit : 400 Milliards de FCFA pour la CAN 2012 et 463 Milliards de FCFA pour la CAN 2017.
La gestion de ces budgets colossaux a été confiée à des hommes liges, incompétents et à la moralité douteuse ; et ce, en marge de la loi et en dehors de toute orthodoxie budgétaire et comptable. Ces crédits importants n’auront servi qu’à assouvir l’assuétude de la gabegie et de la jouissance au sommet de l’Etat, au détriment d’une réelle politique de construction d’équipements structurants, de diversification de l’économie et de développement du capital humain.
Au total, les fluctuations des cours du pétrole qui résultent du fonctionnement normal des marchés, ne peuvent à elles seules justifier l’ampleur de la crise économique et financière actuelle du Gabon. L’absence d’amortisseurs automatiques, les mauvais arbitrages économiques, la gabegie financière et les crimes économiques qui induisent la détérioration des agrégats macro-économiques du pays, sont autant de facteurs qui expliquent la crise actuelle.
C’est aussi cette gouvernance hasardeuse et approximative aux plans politique, économique, social et financier, qui a été sanctionnée par le peuple gabonais le 27 août 2016. Après 7 ans de pouvoir usurpé et dont l’exercice se traduit par la faillite d’un pays aux innombrables potentialités, le peuple Gabonais n’accepte plus sa clochardisation, le chômage de masse, la détérioration de tous les filets de sécurité, la mauvaise orientation des investissements publics, la qualité médiocre des services fournis aux usagers, notamment au niveau de la Justice, de l’Education, de la Santé, des Transports, de la distribution de l’Eau et de l’Electricité. Ce peuple ne peut plus supporter la violation des normes de gestion du système bancaire et des entreprises de micro finances. Il est donc clair que ce peuple n’acceptera pas des privations supplémentaires qu’impliquerait une austérité subrepticement décrétée ou due simplement à un ajustement structurel qui pointe à l’horizon et qui aurait pu être évitée. Lorsqu’on sait par ailleurs que les atteintes aux biens et aux droits des personnes n’ont jamais approché de tels niveaux dans notre pays.
Lorsqu’on sait que la chasse à l’homme se poursuit, malgré une prétendue main tendue, que des arrestations arbitraires de nombreux jeunes qui veulent exprimer librement et démocratiquement leurs opinions continuent à s’opérer sous la férule d’escadrons souvent non identifiés. Lorsqu’on sait qu’à l’instar de Bertrand Zibi et Landry Amianghe de Washington, des Gabonaises et des Gabonais sont illégalement détenus et croupissent dans les maisons d’arrêt et autres lieux de détention.
Nous exigeons que toutes ces personnes qui sont des prévenus politiques et qui sont ainsi privées de leurs libertés, soient libérées sans délai et sans condition. Devons-nous rappeler à ce pouvoir illégitime que l’Etat a l’obligation constitutionnelle de garantir les droits fondamentaux des citoyens, en l’espèce, et que, quels que soient les délits commis, tout citoyen a un droit inaliénable à une justice équitable.
Ainsi, les crimes commis par les membres du gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions ne peuvent être connus que par la Haute cour de justice. C’est cela aussi le respect de l’Etat de droit. Concernant les violations des droits de propriété et le droit des affaires, la junte au pouvoir au Gabon s’organise pour spolier et rançonner certains compatriotes sous des motifs fallacieux, tels que le redressement fiscal ou la lutte contre la corruption, entre autres. Devons-nous lui rappeler que tout citoyen a un droit inaliénable de créer et de faire prospérer ses affaires.
Le cas du Maïsha, qui n’est pas isolé, montre l’acharnement de ce pouvoir à empêcher l’éclosion et la réussite d’une classe de femmes et d’hommes d’affaires gabonais. Peut-on fixer un redressement fiscal qui dépasse largement le chiffre d’affaires de la structure concernée ? De même, une personne sans titre ni qualité peut-elle s’ériger en service de police, s’introduire illégalement dans un domicile et procéder à la saisie ou à la vente de biens du propriétaire sans y être autorisé par une décision de justice. Les acquéreurs des biens saisis ainsi illégalement doivent savoir qu’ils s’exposent à des poursuites pour escroquerie et recel.
N’en déplaise à la Cour Constitutionnelle, qui du reste a perdu toute crédibilité, le peuple gabonais, dans son écrasante majorité, a choisi le 27 aout 2016 de tourner la page et d’en finir avec la dictature, source de multiples souffrances pour les Gabonaises et les Gabonais. Ce choix irrévocable du peuple gabonais ne peut faire l’objet d’un quelconque marchandage.
Les tentatives actuelles d’intimider, de débaucher les militants et les dirigeants de l’opposition ou encore l’organisation d’un prétendu dialogue qui viserait à occulter la décision souveraine de notre peuple, sont à la fois immorales, pitoyables et pathétiques.
Elles ne prospèreront pas. Certes, le pays continue à être abîmé et affaibli par la junte au pouvoir qui s’accroche désespérément aux privilèges et aux passe-droits, pour le confort personnel de ses membres. Mais, c’est le lieu ici d’en appeler au peuple gabonais qui a voté pour l’alternance et le changement d’avoir foi en l’avenir. La solution à la crise profonde que connaît notre pays ne passera que par la reconnaissance de la vérité des urnes et la reconnaissance de la victoire de Jean PING et de la souveraineté du peuple gabonais.
C’est cette solution qui non seulement, contribuera à la réconciliation des Gabonaises et des Gabonais entre eux et avec leurs institutions, mais c’est aussi celle qui ouvrira la voie à la reconstruction de l’Etat, à la relance de notre économie ainsi qu’à la restauration de la cohésion sociale, dans l’intérêt bien compris de tous. Je vous remercie.