Le Gabon a décidé de suspendre le projet de production d’électricité, pour Libreville et ses environs, à partir de deux bateaux usines turques baptisés Karpowership, rapporte le quotidien national l’Union généralement bien informé.
Libreville évoque des « nombreuses insuffisances » et annonce la création d’une commission d’enquête pour faire la lumière sur ce projet qui ressemble à un gros scandale financier.
Le journal gabonais cite une note officielle de la Direction Générale de l’Energie (DGE) adressée le 22 novembre 2024 au représentant de la société Karpowership à Libreville.
La décision gabonaise fait suite à une réunion de haut niveau tenue la veille, sous l’égide du Conseiller Spécial du Président de la République, Chef de Département Energie, Arnaud Engandji. La DGE pointe du doigt « de nombreuses insuffisances relevées dans la mise en œuvre » du projet, sans pour autant expliciter la nature de ces manquements.
« Face à ces préoccupations, les autorités gabonaises ont décidé de diligenter une enquête approfondie afin de s’assurer de la « viabilité » du projet. Une commission spéciale sera mise en place pour mener à bien cette analyse. La DGE a d’ores et déjà sollicité la « pleine collaboration » de Karpowership dans le cadre de ces investigations », précise l’Union.
Le projet Karpowership vise à fournir une solution énergétique rapide et flexible au Gabon grâce à l’installation de centrales électriques flottantes. Adaptables à différents sites de raccordement et types de combustibles, ces infrastructures doivent permettre de répondre aux besoins énergétiques croissants du pays.
L’entreprise turque a déjà fait accoster au large de Libreville les deux navires dédiés au projet. Selon des informations non vérifiées le contrat liant l’entreprise turque à l’Etat gabonais serait entachée par d’énormes rétrocommissions.
Une source consultée par la rédaction de Gabonactu.com soutient que Karpowership percevrait chaque mois environ 10 milliards de FCFA payable par la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG) en sa qualité de revendeur de l’énergie produite et l’Etat gabonais.
L’arrivée de Karpowership devait bouter hors du pays la société Aggreko, une autre société privée qui produit 105 MW d’électricité, soit plus de la moitié de l’énergie consommée à Libreville et ses environs pour une facture globale d’environ 6 milliards de FCFA par mois.
Se sentant menacée par l’arrivée de Karpowership, Aggreko a imposé un black-out dans la capitale gabonaise en août dernier pour se faire payer ses factures non réglées. L’Etat gabonais tourné au ridicule face à son peuple a été obligé de s’endetter auprès des banques pour mettre fin à l’espèce de chantage d’Aggreko installée dans le pays depuis 2003.
Reste à savoir si la suspension du projet Karpowership ne relève pas d’une simple lutte d’influence entre les lobbies financiers. Des voix se sont élevées en août dernier pour dénoncer l’arrogance d’Aggreko et l’insolence du projet turque qui pourrait se révéler catastrophique pour les finances publiques et les consommateurs.
« La solution pour le Gabon est de construire ses propres centrales pour sortir de la dépendance des entreprises privées« , avait soutenu un ancien cadre de la SEEG lorsqu’Aggreko s’était vanté en août dernier d’avoir imposé les délestages à Libreville pour se faire payer en urgence.
Carl Nsitou