Eglises, bars et bistrots dans nos villes… des trous noirs ou la gangrène d’une société profondément malade, explique la chronique du jour à dévorer avec le même plaisir et la même saveur.
Voulez-vous vous enrichir en un laps de temps ? Si cela fait partie de vos rêves les plus fous, je vous conseillerais d’ouvrir un bistrot, un bar ou un bordel, sinon une église du réveil.
C’est une industrie en plein essor qui alimente l’économie souterraine en Afrique. Tous les bordels, bars et bistrots, comme les églises du réveil, au-delà de la débauche dont ils sont des lieux par excellence, sont des endroits de prédilection d’une clientèle abondante.
Alcoolisation et sexualité excessives, veillées de prière et autres gris-gris liturgiques deviennent de véritables opiums des temps modernes. Il faut les voir, chaque dimanche, sapés tel un cadavre prendre le chemin de ces lieux tenus par des escrocs en bande organisée qui, sans scrupule, se font leur beurre.
La petite tirelire familiale et l’argent de la popote du mois se retrouvent dans les poches de ces personnages véreux. Et pour tenir leurs brebis en captivité, et pour ne pas faire douter d’eux, ils s’affublent le titre de Bishop, Pasteur, Evêque, Apôtre ou se font appeler homme de Dieu. Sous leur coupole, c’est une clientèle captive condamnée à les servir fidèlement.
Si les églises du réveil observent un petit répit certains jours de la semaine, les bordels et les bars, pour faire du chiffre, travaillent à plein régime.
Liés par une addiction dévorante, que ce soit ceux des églises éveillées, ceux qui fréquentent les bordels et les bars, sont en fait les mêmes. Le dimanche ils sont au culte et les jours ordinaires de la semaine, ils investissent bars et bordels. Ils se ressemblent, c’est à croire qu’ils sont tous nés du même coïte.
Comment s’étonner de la dépendance de nos jeunes enfants à l’alcool si déjà nous parents sommes des piliers des bars ? Ne sommes-nous pas un peu responsables ?
Aujourd’hui, on se plaint par exemple de l’alcoolisation massive qui gagne nos jeunes apprenants. Le Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), dans l’un de ses communiqués, interdit l’ouverture des bars et autres bistrots situés aux abords des établissements scolaires à des heures de cours.
Si l’élève qui veut à tout prix carburer à la bière, s’encanailler dans ces milieux de haute libation, il ira naturellement sur un terrain moins miné où ce genre d’interdit n’existe pas.
Le CTRI, pour l’efficacité de sa mesure, doit s’inspirer de l’exemple occidental : exiger des pièces d’identité afin de s’assurer que le tenancier n’est pas en face d’un mineur. En cas de transgression de la mesure, le gérant est frappé d’une amande. En cas de récidive, l’établissement est simplement fermé. C’est autant de niches de recettes dont a besoin le trésor public pour financer des projets structurants.
Le CTRI s’apprête à enrôler de nouvelles recrues. On parle d’une masse humaine de 6000 âmes environ destinées à grossir les rangs de la police nationale. Avec un tel flux d’hommes en armes, on pourra déployer des patrouilles afin de faire respecter cette mesure.
Ces recrues pourront être postées devant les églises pour qu’elles s’assurent que le jeune croyant est majeur et qu’il accepte volontiers de se laisser ‘’gouroufier’’ par ces illusionnistes dangereux. Devant chaque bordel, la mesure doit être aussi celle-là. Car ces lieux deviennent la pépinière de la prostitution infantile et de la sexualité précoce.
Il est vrai que certains gourous, malgré leurs frasques imbéciles, saupoudrent leurs prêches d’un brin de morale. On les compte du bout des doigts. Mais la grande majorité en chie royalement, ce qui compte chez eux c’est l’argent qu’ils tirent des artifices théologiques sur fond d’embrigadement mental qui mettent en transe les simples d’esprits. Il est ici question de gavage de cerveaux avec des lieux communs appelés abusivement ‘’la parole de Dieu’’.
A chaque mètre, une église éveillée, un bordel et un bar. Ces industries de la débauche semblent liées par un même destin funeste.
Chez les autres, les toubabs, les bistrots ou bars sont des lieux où il fait bon vivre et où les discussions sont fertiles, mais chez nous c’est tout le contraire. Le quartier Saint-Germain-des-Prés dans le 6ème arrondissement parisien, lieux mythiques qui accueillait des intellectuels de haut vol tels que Raymond Aron, Jean Paul Sartre…, en est une parfaite illustration.
Les bistrots chez nous, ce sont des lieux de dépravation et de perte des valeurs culturelles où l’on ne peut tenir une conversation intelligente sans être parasité par des musiques d’une vulgarité déconcertante amplifiées par le brouhaha d’individus aux visages burinés et aux meurs dissolues.
Un constat : pourtant ceux qui ont fabriqué Jésus, noircissent des pages entières de légendes stupides à son sujet, les inventeurs de bars et des bistrots, tout comme les bordels, ils sont invisibles dans ces lieux recyclés par les Africains à leur manière. Je peine à m’expliquer une telle dépendance chez les Africains.
C’est sans doute le manque de perspective à court, moyen et long terme. Les gens investissent ces églises pour trouver peut-être une raison d’espérer à un lendemain meilleur et peut être le salut post-mortem. Et ceux qui préfèrent s’exiler au fond de la bouteille ou les accrocs des maisons closes, ils trouvent là des raisons de vivre pleinement leurs vies. Leur slogan en dit long : « on ne vit qu’une fois » donc, ils préfèrent se consumer sans la moindre hygiène de vie. C’est, de mon point de vue, leur bouée de sauvetage dans l’océan des incertitudes de la vie. Triste, vraiment triste !!!
Timothée Mémey, journaliste éditorialiste indépendant.
NB : cette chronique ne reflète pas le point de vue de la rédaction