L’avocat franco-libanais né à Dakar, Robert Bourgi. Fils « adoptif » d’Omar Bongo @ DR
Libreville, Gabon (Gabonactu.com) – Robert Bourgi, l’icône encore trop visible de la vielle FrançAfrique, est réapparu ce week-end sur France 24 pour expliquer comment les vielles ficelles de la France – Afrique ont amené Ali Bongo au pouvoir mais aussi prédire un avenir sombre pour Ali Bongo et pour le Gabon, selon lui assis sur une « poudrière » prêt à exploser.
Dans l’entretien – confidences animé par Marc Perelman, l’avocat Robert Bourgi révèle que c’est à lui qu’Omar Bongo sentant sa fin proche avait demandé en juin 2008 de contacter le président français de l’époque, Nicolas Sarkozy, pour recevoir Ali Bongo qu’il avait choisi comme son successeur en tandem avec sa sœur Pascaline Bongo. Omar Bongo avait posé tout de même une condition : » le peuple gabonais doit ratifier ce choix « .
Nicolas Sarkozy aurait refusé de recevoir le fils d’Omar Bongo. A la place, il aurait laissé le Secrétaire général de l’Élysée, Claude Guéant recevoir Ali Bongo. La rencontre aurait eu lieu à Paris à trois entre Guéant, Bourgi lui-même et Ali Bongo. Trois heures d’entretien suivi le lendemain d’un petit déjeuner.
Novembre 2008, Omar Bongo insiste auprès de Robert Bourgi (omniprésent à l’époque au palais du bord de mer à Libreville) pour que l’entretien entre son fils et Sarkozy ait lieu. Sarkozy a fini par le recevoir. Mais insiste sur le vœu d’Omar Bongo : le choix d’Ali doit être ratifié par les gabonais (via les urnes, laisse entendre Bourgi). Sarkozy qui a fini par accepter le choix d’Omar Bongo aurait par la suite donné des instructions à Bruno Joubert, Monsieur Afrique de l’Élysée en faveur d’Ali Bongo. Un nouvel entretien aurait eu lieu au 2 avenue de l’Élysée. Les trois participants à ce déjeuner sont Robert Bourgi, Ali Bongo et Bruno Joubert. Dans le dos d’Ali Bongo, Bruno Joubert aurait confié à Bourgi qu’Ali n’était pas le choix de la France car ce n’était pas une bonne chose.
Malgré cette précaution, Ali Bongo serait à ce moment adoubé par la France, selon Robert Bourgi qui sera informé nuitamment par un coup de fil d’Ali Bongo de la mort en juin 2009 de son père Omar Bongo.
Robert Bourgi, dans le même entretien sur France 24 révèle comment la machine s’est mise en branle pour mettre à la disposition d’Ali Bongo tout l’appareil de l’Etat, à l’intérieur comme à l’extérieur du Gabon pour en faire le futur président de la République du pays.
Deux personnages auraient joué sur tous les tableaux : Jean Pierre Lemboumba Lepandou, un fidèle parmi les fidèles d’Omar Bongo et Guy Nzouba Ndama, président de l’Assemblée nationale.
Le très éloquent avocat ne révèle pas, certainement par omission pourquoi il se brouille avec Ali Bongo devenu président de la République. Il révèle tout de même qu’il a passé 4 ans sans mettre les pieds à Libreville. Sa dernière descente au Gabon a eu lieu l’année dernière. Il serait venu uniquement pour s’incliner sur la tombe d’Omar Bongo, pour honorer sa mémoire. L’on se souvient que Robert Bourgi avait lui-même affirmé qu’il venait à Libreville soulever les valises d’argents qu’Omar Bongo gratifiait aux hommes politiques français (Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et les autres leaders de la gauche comme de la droite).
Avant de quitter Libreville en novembre dernier, Robert Bourgi affirme avoir rencontré Ali Bongo pour lui demander d’ouvrir un dialogue inclusif demandé par les opposants et la communauté internationale. Le chef de l’Etat gabonais lui aurait répondu qu’il n’y aura pas de dialogue inclusif : « à offense publique, excuses publiques », aurait répondu Ali Bongo. Le numéro un gabonais aurait dit à Bourgi qu’il ne recevra pas ses opposants parce qu’ils l’ont insulté dans le dossier de sa filiation avec Omar Bongo.
Selon Bourgi, au lendemain de cet entretien, alors qu’il était déjà à Paris, la presse dite du pouvoir lui a affublé d’injures le traitant de tous les noms d’oiseaux. Du coup, Robert Bourgi dit avoir des remords d’avoir participé activement à faire élire Ali Bongo au Gabon.
Bourgi qui se donne l’image d’un simple philanthrope ne croit pas qu’Ali Bongo sera réélu. « Je ne vois pas Omar Bongo derrière Ali Bongo. Je ne le vois pas du tout », affirme-t-il en ajoutant qu’Omar Bongo n’avait pas une bonne vision sur sa succession.
« Le constat que je fais, c’est que le Gabon est assis sur une poudrière qui menace d’exploser à n’importe quel moment et j’ai peur pour le régime d’Ali Bongo Ondimba », chantonne Bourgi d’une voix tremblante, la gorge nouée.
« C’est un régime qui repose sur le tout répressif, sur l’aspect sécuritaire (…) on en est pas loin » d’une dictature, conclu-t-il.
La présidence de la République n’a pas encore officiellement réagi à ces affirmations qui interviennent dans un contexte préélectoral. L’opposition et les activistes via les réseaux sociaux s’en régalent.
Daniel Etienne