Les employés de Satram-Egca et Alogis ont durant une conférence de presse tenue le 20 novembre 2025 devant le Tribunal de première instance de Port-Gentil, dénoncé plusieurs mois d’arriérés des salaires dont ils font face. Ils ont également mis en lumière la procédure de liquidation judiciaire de leur entreprise ainsi que la marginalisation sociale qui en résulte, affectant gravement leurs conditions de vie quotidiennes.
« Nous sommes ici aujourd’hui pour témoigner de la détresse profonde que vivent les employés qui, depuis mars 2025, n’ont toujours pas perçu leurs salaires, certains accumulant à ce jour plus de soixante mois d’arriérés », a fustigé Dimitri Fouafoua, délégué du personnel.
Effectivement, au fil des mois, la crise sociale affectant le groupe Satram-EGCA & Alogis s’est imposée comme l’un des mouvements sociaux les plus marquants des dernières années au Gabon. Entre retards de paiement, accusations de mauvaise gestion, licenciements contestés et litiges judiciaires, cette affaire met en lumière les fragilités structurelles d’un acteur majeur de la logistique nationale. Le jeudi 20 novembre, les représentants du personnel ont ainsi choisi de s’exprimer publiquement pour alerter les autorités nationales sur leur situation préoccupante.
« Malgré l’instauration des instances judiciaires chargées de la liquidation, notamment les juges, commissaires et syndics, une lenteur préoccupante et préjudiciable persiste dans l’exécution de cette procédure. Le débiteur, qui est en réalité notre employeur, au lieu de s’acquitter de ses obligations, multiplie les recours juridiques, entravant ainsi le liquidateur dans l’exercice efficace de ses fonctions régaliennes, exacerbant par conséquent notre situation difficile », déplore le délégué du personnel.
Au cœur de ce conflit se trouve un problème quasi structurel : les salaires sont versés au compte-gouttes, souvent avec plusieurs mois de retard. Pour un grand nombre d’employés, cette situation est devenue insoutenable : loyers impayés, scolarité compromise, dettes accumulées.
D’après Dimitri Fouafoua, « pendant toute cette période, nos familles vivent dans la détresse. Certains parmi nous n’ont pas pu assurer la scolarisation de leurs enfants; d’autres voient leur état de santé se dégrader faute d’accès aux soins et à la prévention. Certains ont même perdu la vie sans avoir pu obtenir les droits qui leur revenaient légitimement. Plusieurs familles se retrouvent disloquées et marginalisées ».
Par ailleurs, Satram, EGCA et Alogis occupent une position centrale au sein de la chaîne logistique gabonaise : manutention portuaire, acconage, opérations offshore ainsi que transport et stockage. La grève initiée par Satram-EGCA et Alogis met en exergue les fragilités auxquelles sont confrontées certaines entreprises stratégiques au Gabon, où une gestion défaillante peut rapidement dégénérer en une crise sociale majeure. Au-delà des manifestations et des piquets de grève, cette situation soulève une problématique essentielle : comment assurer la stabilité sociale tout en maintenant la compétitivité logistique dans un secteur crucial pour l’économie nationale ?
« Nous sommes ici pour exprimer notre refus catégorique. Il est intolérable que, dans un État de droit, les travailleurs soient laissés volontairement dans une situation d’insécurité accrue et d’injustice manifeste. Il est inconcevable qu’au sein d’un tel État, certains employeurs méconnaissent les lois en vigueur et circulent librement devant les tribunaux sans être sanctionnés. Nos dirigeants s’adonnent à une gestion financière désordonnée et commettent des actes de prédation », déclare Dimitri Fouafoua.
Les salariés maintiennent leur mobilisation avec détermination afin d’obtenir une résolution pérenne de leurs revendications.
« Nous exigeons que les autorités compétentes interviennent sans délai, garantissent le respect de nos droits et procèdent au paiement immédiat de nos salaires impayés », affirment-ils.
Ils appellent ainsi à une prise de conscience collective visant à réparer un préjudice qui perdure depuis trop longtemps. Les employés ont affirmé qu’ils ne céderont pas tant que justice ne sera pas rendue, dans le but ultime de restaurer leur dignité ainsi que celle de leurs familles et de la société toute entière.
Jean-Jacques Rovaria Djodji
