Une cinquantaine de personnes ont brièvement marché, samedi à Libreville, pour dénoncer les assassinats et disparitions d’enfants, avant d’être pacifiquement stoppées par la police pour défaut d’autorisation, a constaté un reporter de Gabonactu.com.
La marche s’est déroulée sur un court trajet reliant l’échangeur de Nzeng Ayong, dans le 6ᵉ arrondissement de Libreville, à une station-service située à moins de 500 mètres. Tout au long du parcours, les manifestants ont brandi des pancartes et banderoles sur lesquelles on pouvait lire : « Je suis Cameron », « Stop aux crimes rituels », « Nos enfants ne sont pas de la viande », ou encore « Justice pour Cameron ».
Munis pour certains de sifflets au son parfois strident, les participants ont scandé des slogans et entonné des chants hostiles aux crimes rituels et aux crimes de sang, un phénomène qui continue de susciter peur et indignation au sein de la population.
« Je marche parce que j’ai peur pour l’avenir des enfants du Gabon », a confié Marie Thérèse, une mère de famille d’une quarantaine d’années. Un autre manifestant, la quarantaine également, vêtu d’un t-shirt à l’effigie du président de la République, Brice Clotaire Oligui Nguema, a déclaré : « Je ne connaissais pas Cameron, mais sa disparition tragique m’a profondément choqué. Je suis venu dire : plus jamais ça au Gabon ».
Alors que la marche se déroulait calmement sur le trottoir, sans troubler l’ordre public, un véhicule de la police est intervenu pour y mettre un terme. Malgré des échanges avec les forces de l’ordre, les manifestants n’ont pas obtenu l’autorisation de poursuivre leur mobilisation.
La police a ensuite réquisitionné des taxis-bus pour transporter les manifestants jusqu’au domicile de Pascal Cameron Ngeba Loko, un collégien de 13 ans, retrouvé mort dans une fosse septique située au bas de l’immeuble où il résidait, au deuxième étage.
Selon les premiers éléments de l’enquête, un suspect, bien connu de la famille, interpellé par la police, a avoué avoir kidnappé le jeune élève en classe de 4ᵉ. Le drame se serait produit alors que Cameron avait été envoyé par sa mère chez le boutiquier du quartier, à une centaine de mètres du domicile familial, aux environs de 18 heures.
« Quand l’alerte de la disparition de Cameron a été donnée, ce jeune, connu des enfants sous le sobriquet de “Tonton rasta”, était en première ligne pour faire semblant de le rechercher », a confié à Gabonactu.com un jeune du quartier. « Nous le connaissions bien. Il travaillait dans un garage de réparation automobile et il a avoué le crime au commissariat », a-t-il ajouté.
Profondément bouleversé, le père de la victime a indiqué à Gabonactu.com qu’il aidait régulièrement le suspect, qu’il décrivait comme quelqu’un d’assez gentil en apparence. Il s’interroge encore sur ce qui a bien pu se passer ce jour-là.

Sous le coup de la colère, des riverains se sont attaqués aux biens du principal suspect, présenté comme le commanditaire du crime, lequel aurait agi dans le but de prélever des organes génitaux de la victime à des fins fétichistes.
« Notre rôle était d’attraper le petit pour le livrer sans l’assassiner », a reconnu l’un des jeunes mis en cause lors de son audition au commissariat. Une prime d’un million de francs CFA aurait été promise aux deux ravisseurs pour l’enlèvement du jeune Cameron.

Une enquête judiciaire a été ouverte afin de faire toute la lumière sur cette affaire qui a profondément choqué l’opinion publique. La date de l’inhumation du collégien n’a pas encore été fixée. En attendant, la police reste déployée dans le quartier pour prévenir tout débordement.
Le cas de Cameron n’est pas isolé. En août dernier, la petite Esther a disparu au quartier PK 12. Elle a finalement été retrouvée violée et morte dans le voisinage. Vendredi et samedi, deux corps sans vie ont été retrouvés à Libreville. L’un à la cité Amissa dans le nord de Libreville et le second à IAI dans le 5ème arrondissement aux abords d’un échangeur très fréquenté.
Sous l’ancien régime, ce genre de crime étaient monnaie courante à la veille des campagnes électorales ou des grandes nominations dans l’administration publique.
Ils seraient l’œuvre des marabouts consultés par des hommes politiques espérant une ascension sociale et politique. Les organes prélevés des victimes servent à fabriquer des fétiches sensés procurer puissance, argent et rayonnement social.
Carl Nsitou

