En détention préventives depuis bientôt un an pour des faits supposés de « outrage au Chef de l’Etat, Ali Bongo Ondimba et d’incitation à la révolte », Gaël Koumba Ayounet surnommé : ‘’le Général des Mapanes’’ et Edou Mve alias ‘’Hoffman’’, reconnus également comme les indics du pouvoir, ont été présentés à la barre le 07 janvier 2022 devant laquelle ils ont tout balancé.
Ci-dessous, le compte rendu de l’audience produit par l’ONG SOS Prisonniers Gabon
Compte rendu de l’audience correctionnelle de Gaël Koumba Ayounet alias le Général des Mapanes et de Edou Mve alias Hoffman, ce vendredi 7 janvier 2022.
Le Général des Mapanes et son compère Hoffman avaient été arrêtés suite aux « mouvements des casseroles » initiés pour contester les mesures drastiques du gouvernement gabonais liées à la lutte contre la Covid-19 .
Les deux prévenus sont poursuivis pour les chefs d’accusation de: « outrage au Chef de l’État et aux forces de Police nationale, incitation à la révolte et associations de malfaiteurs », délits punis par les articles 157, 158 ,160, 187, 193 et suivants du Code pénal gabonais.
À la barre Gaël Koumba Ayounet (le Général des Mapanes), tout vêtu de blanc jusqu’à sa chaussure plastique, crâne bien rasé. visiblement, le Général des Mapanes n’a rien perdu de son style. A sa gauche, Hoffer Edou Mve (Hoffman) qui semble moins présentable que son compagnon.
Ce dernier va nier en bloc les chefs d’accusation qui pèsent contre lui. Selon Hoffman, son arrestation est un règlement de compte. En effet, le jeune homme dit : « je suis un soutien indéfectible du Chef de l’Etat, en aucun cas je ne peux inciter les jeunes à la révolte contre le Chef de l’Etat, ni l’outrager. Quand y a eu les mouvements des casseroles, je n’avais pas participé. Je n’étais même pas sorti de chez moi. La nuit où y a eu le drame dans les pk, j’avais reçu le coup de fil du service de renseignement pour me demander qu’est-ce qui se passe au pk, nous avons appris qu’ il y a morts au pk, qu’est ce qui se passe ? C’est n’est que le lendemain matin que j’étais « au terrain » pour m’enquérir de la situation. Ensuite, je suis allé faire le compte-rendu à qui de droit.
Je travaille pour le Chef de l’Etat, que j’ai d’ailleurs l’habitude de rencontrer, ajoute le jeune homme.
Quant à Koumba Ayounet alias le Général des Mapanes, il est 11h25 quand Madame la Présidente du Tribunal lui donne la parole.
Aussitôt, l’homme passe à l’offensive: « Depuis mon arrestation, j’ai l’impression qu’il y a un méli-mélo. Même un enfant de 2 ans peut se rendre compte qu’il y a un complot contre moi. »
Une semaine avant mon arrestation, j’avais d’abord été interpellé devant mon portail. Je sortais de la maison et j’avais été kidnappée devant mon portail.
Heureusement que j’avais vite lancé un coup de fil à ma femme et que j’ai crié « on me kidnappe on me kidnappe » j’avais mis mon téléphone en mode libre.
Une fois dans le pick-up, un agent va enlever sa cagoule et va me dire » Tu ne me reconnais pas ? Calme-toi »
J’ai reconnu l’agent. Après, il va me dire que c’est le directeur du B2 qui veut me parler. »
Puis le Général des Mapanes revient sur son arrestation et ses conditions de garde à vue au B2.
« Quelques jours après, alors que j’etais à mon bureau, je venais de finir une réunion, les éléments du B2 sont revenus m’arrêter. Puis j’ai été conduit au sous-sol du B2. J’avais trouvé 3 petits qui avaient également été arrêtés pour le mouvement des casseroles et 5 autres personnes qui étaient depuis un mois au B2. J’ai passé deux semaines au sous-sol du B2 sans voir un membre de ma famille ni mon avocat.
C’est au B2, que je constate qu’on me mélange avec Hoffman et j’ai posé la question aux agents « Pourquoi on me mélange avec Hoffman ? »
Mais personne ne m’a répondu. Une fois déféré au Tribunal, j’avais également posé la question au Procureur adjoint qui nous a reçus.
Quand nous sommes envoyés chez le juge d’instruction, le juge me dit que je suis poursuivi pour « outrage au Chef de l’Etat » et j’ai dit au juge d’instruction « C’est une grosse blague ou quoi ? Je suis un soutien indéfectible du Chef de l’Etat, il n’ y a pas un jeune comme moi qui défend le Chef de l’Etat ! »
Il ajoute: « Depuis 10 mois que je suis à la prison centrale, je suis dans une cellule disciplinaire, je suis interdit d’appeler comme les autres détenus. Même Hoffman qui est poursuivi pour les mêmes motifs que moi n’est pas en cellule disciplinaire. Et je suis malade régulièrement, j’ai l’otite, mais depuis plusieurs mois je n’arrive toujours pas à voir le médecin de la prison centrale. Qu’est-ce que j’ai fait ? J’ai tué qui ? Je ne mérite pas ce traitement ! »
La salle d’audience est très calme, la Présidente du Tribunal assure parfaitement la police de l’audience, elle détend même l’atmosphère de temps en temps.
Le Général des Mapanes révèle au Tribunal que lors du déferement au Parquet de la République, une fois au bureau du Procureur adjoint, Hoffman va demander au Procureur de faire sortir d’abord le Général des Mapanes.
La Présidente du Tribunal pose alors la question à Hoffman : « Pourquoi aviez-vous demandé au Procureur de faire sortir d’abord votre ami du bureau? »
Hoffman hésite à répondre à la question, il balbutie un peu. Finalement il dit au tribunal « parce que je voulais véritablement me présenter au Procureur. »
Aussitôt, l’avocat du prévenu va chuchoter à l’oreille de la Présidente pendant quelques minutes. Cela suscite les murmures du voisin de SOS Prisonniers Gabon : » Koh l’avocat ne veut pas que la juge insiste sur la question, sinon, Hoffman va balancer toute la doc ! »
Après ce chuchotement, la Présidente a reformulé la question.
Quelques temps après, le Tribunal pose la question au Général des Mapanes « Aviez-vous fait une vidéo pour inciter les jeunes à la révolte ? »
Je n’ai jamais fait une vidéo pour inciter à la révolte. Je n’ai pas pris part aux mouvements des casseroles. Quand quelque chose se passe à Plein Ciel, c’est moi que le renseignement appelle et quand c’est dans les pk c’est Hoffman.
Chacun gère sa zone. Nous avons habitude de nous retrouver avec le Chef de l’Etat. Nous faisons le renseignement, on fait remonter les informations au Chef de l’Etat. Ceux qui nous ont envoyé ici ne devraient pas nous traiter ainsi.
« J’ai juré fidélité au Chef de l’Etat. Comment je peux encore poser des actes qui vont le nuire ? », conclut le Général des Mapanes.
Place aux réquisitions du Procureur de la République.
Il commence d’abord par faire un bref rappel des événements qui ont secoué la capitale gabonaise suite aux mouvements des casseroles. Puis il tente de faire asseoir le délit d’outrage au Chef de l’Etat.
Le Procureur dit que le fait de remettre en cause l’existence du Chef de l’Etat, ses capacités physiques et intellectuelles, constituent un outrage au Chef de l’Etat.
Selon le Procureur, Hoffman a fait des déclarations dans lesquelles il remettait en cause l’existence du Chef de l’Etat suite à ses problèmes de santé.
Sur l’outrage aux force de police nationale, le Procureur ajoute qu’au cours d’une réunion dans le pk7 Hoffman avait clairement dit « les policiers sont des vaches, ils n’ont pas fait l’école… »
Par conséquent, cela est suffisant pour le déclarer coupable dudit délit.
Toutefois, le Procureur reconnaît que le Général des Mapane n’a pas commis d’outrage au Chef de l’Etat.
Sur le délit d’incitation à la révolte, le Ministère Public dit que le nommé Edou Mve alias Hoffman a fait plusieurs vidéos où il demande aux jeunes ‘de se lever » pour les inciter à troubler l’ordre public.
Le procureur demande au Tribunal de déclarer coupable Hoffman et le Général des Mapane du délit d’incitation à la révolte.
Il ajoute que les deux quartiers où y a eu des troubles pendant le mouvement des casseroles étaient dans les pk et à Plein Ciel, deux quartiers qui ont pour leaders Hoffman et le Général des Mapanes.
Sur la détermination de la peine, le Parquet a dit s’en remettre à la « sagacité intellectuelle et à la sagesse du Tribunal. »
L’avocat de la défense commence sa plaidoirie en présentant des vœux de santé, de sagesse à la Présidente du Tribunal.
Sur les charges qui pèsent sur ses clients, il dit que ses clients sont victimes de leurs loyauté envers le Président de la République.
« Edou Mve et Koumba Ayoune sont deux soldats du Chef de l’Etat et pour preuve, au lendemain de « l’ incident de santé du Chef de l’Etat le Général des Mapanes a été le premier à organiser dans un temple de bwiti des prières pour le rétablissement du Chef de l’Etat.
« L’avocat dit au Tribunal qu’il n’y aucune preuve pour condamner ses clients à l’outrage et à l’incitation à la révolte. Et que l’association de malfaiteurs n’est pas constituée, vu que les deux prévenus ne se sont jamais vus pour préparer quoi que ce soit.
Le Général des Mapanes a même été surpris de voir qu’il est dans le même dossier que Hoffman.
Il demande donc la relaxe au bénéfice du doute de Hoffman, et à titre subsidiaire de le condamner à la durée qu’il a déjà passé en détention préventive.
Quant à au Général des Mapanes, il demande la relaxe pure et simple.
L’affaire a été mise en délibéré le 21 janvier prochain.
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