Brice Laccruche Alihanga séjourne actuellement en prison © D. R
L’arrestation spectaculaire, suivie de l’incération humiliante de Brice Laccruche Alihanga, est le sujet le plus commenté en ce moment au Gabon, en même temps qu’il fait trembler la République où l’on se demande maintenant de quoi demain sera fait tant l’ancien tout puissant Directeur de cabinet d’Ali Bongo qui en sait un bout, en a fantasmé et nourri plus d’un.
A l’annonce de sa chute et surtout de son arrestation pourtant inévitable au regard de l’ambiance délétère au sommet de l’Etat, beaucoup ont cru à un gag, une de ces plaisanteries de mauvais goût dont on se serait bien passé en ce début de décembre.
Mais très vite, l’affaire a pris forme et aujourd’hui, le redoutable Brice Laccruche Alihanga, le messager d’Ali Bongo, dort en prison. Et de peur que personne n’en oublie, seul son avocat s’est ému des conditions d’incarcération de l’illustre client de Sans Famille. Ceux qui ont entendu cette tirade ont dû bondir de stupéfaction au vu de la gravité des faits mis à la charge du tout-puissant Dircab du chef de l’Etat.
Entre autres, un détournement massif de fonds publics. Des sommes à enflammer les esprits et qui ont fait dire à plus d’un que cet homme qui exaspérait la classe politique nationale et toute tendance confondue, ne méritait, au mieux, la prison à vie et au pire, le peloton d’exécution. La saga financière qui l’a rendu célèbre était telle qu’elle a fini par contaminer tous ceux qui mangeaient dans la main de BLA. Une fringale qui aurait pu se poursuivre si une main invisible venue du Benin,dit-on, n’avait pas arrêté le massacre tant qu’il s’agissait bien de l’argent public et non d’un quelconque héritage.
A ce jour, personne, même pas le gouvernement qui s’illustre négativement et sans discernement par une chasse aux sorcières, n’a aucune idée des sommes dissipées par Brice Laccruche Alihanga et des bénéficiaires réels. Quelques jours après son arrestation des caches mises au jour ont révélé que l’homme s’est constitué un véritable trésor de guerre et que tout cela était tout, sauf innocent. De plus, l’homme était devenu si arrogant qu’il n’avait d’égard pour personne. Les Gabonais n’en pouvaient plus.
Qu’on se remémore sa célèbre boutade au cours d’un meeting à Nzeng-Ayong : « Qui boude, bouge ». Pour bien montrer qu’il avait toute la République à sa botte, l’assistance avait applaudi à tout rompre. L’effet BLA était à son apogée Et lui-même en était persuadé, sa tournée républicaine lui ayant donné toutes les garanties qu’il était sur la bonne voie. Officiellement, il était l’envoyé de Ali Bongo. Et tout le monde ou presque y avait cru. Du gouvernement à l’ensemble des institutions de la République.Mais aujourd’hui qu’il est derrière les verrous, reste un danger public pour la survie politique de bien d’acteurs politiques, tout le monde ou presque pense qu’il avait un agenda caché. BLA, entend-on partout, jusque dans les milieux de sa nébuleuse, l’Ajev, jouait sa propre partition. Ce qui a probablement conduit à son arrestation. C’est la débandade. Même les célèbres vagues bleues ont disparu qui ont traumatisé le parti au pouvoir ont disparu de la scène.
Brice Laccruche Alihanga durant une étape de sa tournée républicaine à l’Estuaire © D.R
Mais le feuilleton Bla n’en est qu’à ses débuts en ce qu’elle recèle de nombreuses zones d’ombre et pas les moindres. On sait que l’ancien DIRCAB qui est loin d’être un idiot en a mouillé pas mal dans la République, aussi bien dans la haute administration publique que parapublique, qu’au sommet de l’Etat. Pour tisser sa toile, il avait besoin de tout le monde. Il ne se trouve pas un seul qui ait dit non à l’homme le plus puissant du système à un moment donné. Tout le monde a vu tout le monde.
En clair, tout le monde, jusqu’à ceux qui tentent de devenir blanc comme neige, tout en noircissant d’autres compatriotes pour échapper à la bourrasque, si bourrasque il y a, lui a fait allégeance. Et c’est la plus étrange séquence de l’histoire, au regard de l’attitude de la classe politique depuis que Laccruche, « le naïf » politique, est tombé. Plus personne à ses côtés pour plaider son sort. Au contraire, on estime plutôt qu’il est bien là où il est aujourd’hui. En plus, pour qu’il ne sorte point de son trou.
Des scènes de liesse ont même été enregistrées, par exemple à Ntoum, pourtant fief de l’Ajev, quelques jours à peine après le limogeage de BLA dont l’actuel Premier ministre n’était plus sa tasse de thé. Pour faire court, il était de plus en plus question pour le pseudo émissaire de faire partir Julien Nkoghé Bekale, dont il avait pourtant validé le choix, pour le remplacer par un ajeviste bon teint. Depuis, le PM, devenu un Sioux sur le sentier de la guerre, était sur le fil du rasoir. Il se savait en sursis tout en multipliant des remaniements ministériels à la limite du ridicule. Aussi, la chute de Bla, devenu son cauchemar, l’a-t-il requinqué même si, en même temps, l’avènement de Nourredin Bongo Valentin l’a quelque peu refroidi. Julien Nkoghé Bekale n’est toujours pas sorti de l’auberge et avec lui son gouvernement sous pression.
Mais c’est nettement mieux que le souffle de Laccruche derrière sa nuque. Et puis encore d’autant que c’est le même Laccruche qui aurait appuyé la nomination de Julien quand il s’est agi de confier à nouveau la Primature à l’Estuaire.
Comment cela fait-il donc qu’à peine débarqué, tout le monde soit entrain de danser sur son cadavre ? Ou BLA a été, comme on le dit, naïf pensant que rien ne pouvait plus arriver et qu’il pouvait tout se permettre, ou il ne connaissait pas les Gabonais, prêts à tout pour prendre de l’argent quand ils ont l’opportunité.
Et l’affaire a aiguisé leur appétit. Une affaire qui risque de faire boule de neige tant tout le monde dans la République parait mouillé. Ceux qui allaient se sucrer à Angondjé ou le recevait à domicile ou ailleurs lors de sa tournée qui a sonné le glas de son projet, n’ont plus le sommeil tranquille.
Brice Laccruche Alihanga avec la posture du messager du Chef de l’Etat © D.R
Selon des sources concordantes, même les hauts gradés des forces de sécurité dernièrement promus par lui, sont dans la tourmente. Tant et si bien qu’à chaque conseil des ministres, chacun tâte sa peau, s’attendant à ce que le couperet tombe et réduise leur vie à néant après avoir tutoyé les cimes de la gloire.
Pour épaissir encore un peu plus les soupçons, alors qu’au sein du gouvernement on est toujours à la recherche des moutons noirs qu’ils sont pourtant tous, personne ne s’étant ouvertement dressé sur la route de BLA, Tonton Associé, l’oncle de Ali, a révélé que des comptes bancaires de certains « officiers », jusqu’à certains trouffions ont été anormalement crédités. Signe qu’il y a anguille sous roche et que le malaise est bien réel et général.
Croyant bien faire, un défenseur ardent de Tony Ondo Mba, probablement un parent, aurait menacé de révéler les noms de ceux qui ont bénéficié des largesses de l’ex ministre de l’eau, le bras droit de Bla dans la localité, si celui-ci était arrêté. Deux jours après, Tony était épinglé. Comme BLA par la suite, il dort en prison.
Dans le Grand Sud, plus personne ne jure par Christian Patrichi Tanassa Mbadinga, alors que certains patrons des institutions, et non des moindres, ont parfois fait le déplacement de Ndendé solliciter son soutien et son onction pour se maintenir.
Pour sûr, l’affaire promet de révéler des dessous. Du coup tous qui ont mangé parfois goulument dans la main de l’ex puissant Dircab, passé brusquement et brutalement de la lumière à l’ombre, ne veulent plus rien savoir de lui.
Ils se comportent désormais, avec l’espoir de préserver leurs intérêts et sauver leur tête comme Pierre quand on torturait Jésus. A ceux qui voulaient le lier au Christ, il avait- eu cette réplique : « Homme, je ne sais pas de quoi vous parlez ».
Camille Boussoughou