Me Francis Nkéa le 15 septembre 2016 @ archives Gabonactu.com
Libreville, 6 février (Gabonactu.com) – Le ministre de la Justice, Me Francis Nkéa Ndzingué dont la tête au gouvernement est mise à prix par le puissant syndicat des magistrats serait-il sur le point de démissionner pour débloquer la crise dans les tribunaux du pays paralysés par une grève déclenchée le 13 décembre 2017 ?
La question mérite d’être posée mais la réponse difficile à trouver. Une certitude : le garde des Sceaux est sur le point de faire une importante communication, selon une déclaration lue mardi par le président du Syndicat national des magistrats du Gabon (SYNAMAG), Germain Nguema Ella.
Le SYNAMAG affirme avoir obtenu cette information de la part du Premier ministre chef du gouvernement, Emmanuel Issozé Ngondet qui a reçu lundi les syndicalistes près de deux mois après le déclenchement de leur grève très suivie dans tous les tribunaux du pays.
« Le SYNAMAG reste donc suspendu à cette communication et vous donne rendez-vous afin de vous faire part de son appréciation », a indiqué, sans enthousiasme, le SYNAMAG dans sa déclaration de mardi. Loin d’enterrer la hache de guerre après cette annonce du Premier ministre, le syndicat a davantage durci le ton en avertissant que « pour que notre patience ne soit plus considérée comme une faiblesse, le SYNAMAG se réserve le droit de faire une marche de protestation et de procéder à la fermeture pure et simple de toutes les juridictions sur l’ensemble du territoire national ».
Le SYNAMAG maintient son unique condition et persiste que sa grève sera levée uniquement lorsque l’actuel ministre de la justice quittera ses fonctions. Les grévistes ne digèrent pas les propos du ministre de la Justice qui aurait traité les magistrats gabonais de « corrompus ».
Le garde de sceaux est accusé d’immixtion dans les procédures judiciaires violant ainsi le secret de l’instruction. Il aurait avait accusé le président du SYNAMAG d’avoir tenté de lui soustraire une forte somme d’argent contre « un prétendu silence ». Me Francis Nkea Ndzingué, avocat au barreau du Gabon, aurait « ouvertement accusé un juge d’instruction d’avoir reçu d’un inculpé des fortes sommes d’argent contre sa mise en liberté ». Il aurait même menacé d’arrêter un juge d’instruction.
Ce film de très mauvais goût pourri le fonctionnement des tribunaux du Gabon. A cause de la grève, quasiment plus rien ne fonctionne. Depuis le 14 décembre 2017, tous les tribunaux du pays sont déserts. Les personnes gardes à vu ne sont présentées au parquet qu’une seule fois par semaine : le mercredi. Toutes les audiences publiques sont suspendues. Seuls les dossiers en cours d’instruction sont traités au sein des cabinets. Comme si cela ne suffisait pas, le SYNAMAG veut davantage réduire ce service minimum en mettant fin à l’étude des dossiers en cabinet et en recevant les personnes gardées à vu dans les commissariats une seule fois tous les 15 jours.
La communication du ministre Nkéa Ndzingué est donc très attendue par les magistrats et mêmes les justiciables. Trouvera-t-il les mots justes pour « gagner » son « procès » contre ses magistrats qui lui ont tourné le dos ? Annoncera-t-il sa démission pour couper court ? Durcira-t-il le bras de fer car démissionner pourrait fragiliser le gouvernement ou créer une jurisprudence dans le pays ? L’exercice n’est pas aisé pour cet avocat à la bouche bien longue.
Camille Boussougou