Traditionnellement, perçues comme un simple cercle d’épargne entre voisines ou collègues, les tontines féminines sont aujourd’hui au cœur de la vie sociale gabonaise. Elles permettent à de nombreuses femmes d’économiser, de financer leurs projets et de se soutenir dans un contexte économique assez difficile pour certaines. Sur la toile, les E-tontines elles sont de plus en plus mixtes et diversifiées. On y acquiert quasiment tout, dans un système de ristournes : téléphones, vêtements, perruques et bijoux, meubles et constructions, etc. On aurait dit que les tontines, féminines à l’origine, se métamorphosent. Mais, Prudence !
L’arrivée et l’évolution de WhatsApp, Facebook et Tik-Tok ont profondément transformé les tontines. Les cercles d’épargne sont devenus connectés, flexibles et plus structurés, avec le Mobile Money qui remplace et facilite la circulation de l’argent liquide. Les tirages des ristournes se font en direct vidéo ; les listes sont automatisées et partagées en PDF ; les groupes s’ouvrent même à la diaspora.
« On ne se voit pas, mais la confiance reste la base », souligne Gaëlle entrepreneuse gabonaise et administratrice d’un groupe de 1018 membres. « Les réseaux sociaux ont simplement modernisé ce que nos mères faisaient déjà, mes tontines sont fiables et mes clients sont toujours satisfaits », a-t-elle expliqué.
Avec la digitalisation, de nouveaux types de tontines apparaissent. On ne tourne plus seulement pour recevoir de l’argent, mais aussi des biens matériels comme des smartphones dernière génération, machines à laver, frigos et petits électroménagers, perruques haut de gamme, voitures, meubles, téléviseurs ou ring lights, etc. Cette évolution crée une nouvelle manière d’acheter de façon plus accessible.
Bien plus que de l’argent, les tontines créent des espaces de cohésion. Elles apportent discipline, écoute et entraide, même si certaines participantes reconnaissent une pression liée aux cotisations et aux retards. Des tensions peuvent survenir, mais la solidarité et la volonté restent le ciment du groupe.
Face à l’ampleur du phénomène, certaines institutions de microfinance se sont mises à reproduire ce mécanisme traditionnel. Elles proposent désormais des produits d’épargne et de prêt inspirés des tontines, avec des versements réguliers obligatoires, une cagnotte collective redistribuée par rotation, des crédits express basés sur l’esprit d’entraide.
Ces structures y voient un modèle efficace pour toucher une clientèle qui fait encore peu confiance aux systèmes bancaires classiques, ou qui y est exclue pour diverses raisons. Si les tontines modernisées facilitent l’accès aux biens et à l’épargne, elles attirent aussi les escrocs et les problèmes. Groupes fictifs, administratrices fantômes, disparitions après les encaissements, etc.
Les témoignages affluent sur les réseaux et la pression numérique devient la solution pour signaler et afficher les indélicats. D’où l’intérêt de plus en plus pressante pour la puissance publique afin d’y mettre bon ordre. Une régulation du secteur devient nécessaire.
« J’ai perdu 50 000 F dans une tontine de draps en ligne que je faisais avec une certaine Christidys comme mère tontine une vraie menteuse », regrette une internaute. « Maintenant, je ne rejoins que les groupes où je connais au moins deux personnes où l’on demande les pièces d’identité pour identifier tout le monde », se méfie-t-elle.
Pour une autre internaute l’expérience est bien meilleure « Grâce à l’e-tontine j’ai pu avoir un nouveau téléphone de marque IPhone 11 et des draps de très bonne qualité. Je suis satisfaite et je ferai peut-être une autre pour une voiture dans les mois prochain » a-t-elle dit, visiblement satisfaite.
Entre tradition, modernité et débrouillardise, les tontines féminines reflètent la résilience et la créativité des nombreuses femmes. Qu’elles soient gérées sur WhatsApp, structurées en microfinance ou centrées sur l’achat d’un bien, elles demeurent un pilier de solidarité.
M.-O. Mignonne et Tryphène Lembah

