Dr Marie-Reine Chirezi FABRY, Coordonnatrice Résidente par intérim du Système des Nations Unies. Madame Aïssatou Diallo représente de la banque mondiale pour le Gabon, Patrick Barbera Isaac, Ministre du travail (extrême droite). Robert Utz, économiste en chef pour les pays de la CEMAC © Gabonactu.com
La Banque mondiale a présenté ce lundi 23 juin 2025 à Libreville la cinquième édition de sa note de conjoncture économique sur le Gabon, centrée cette année sur la transformation des richesses nationales au service du développement humain.
Plusieurs personnalités ont assisté à la rencontre, dont le ministre du Travail Patrick Barbera Isaac, la représentante de la Banque mondiale Aïssatou Diallo, l’économiste en chef pour la CEMAC Robert Utz, ainsi que la coordinatrice résidente par intérim du Système des Nations Unies, Dr Marie-Reine Chirezi Fabry. Les analyses ont été détaillées par Éric Tjong, économiste pays.

Le document met en évidence une croissance modérée, marquée par une progression de 2,9 % en 2024, contre 2,4 % l’année précédente. Cette amélioration s’explique principalement par la hausse de la production pétrolière (+4,6 %) et le dynamisme des travaux publics. Pourtant, les indicateurs sociaux restent préoccupants. Près de 35 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, 20 % des Gabonais sont sans emploi, et la richesse nationale par habitant a chuté de 34,7 % entre 1995 et 2020. Pendant ce temps, la dette publique dépasse les 72 % du PIB, au-dessus du plafond communautaire fixé à 70 %, et le déficit budgétaire atteint -3,7 % du PIB.
Face à ce paradoxe, la Banque mondiale alerte. « La croissance actuelle est réelle, mais elle reste peu inclusive », a déclaré Éric Tjong, économiste pays, en présentant les grandes lignes du rapport. L’institution pointe une économie trop dépendante de trois produits, à savoir le pétrole, le bois et le manganèse, qui représentent 97 % des exportations. Une concentration qui rend le pays vulnérable aux chocs extérieurs et freine la transformation structurelle.
Des richesses naturelles encore sous-exploitées
L’édition 2025 met l’accent sur le concept de richesse nationale, qui intègre le capital naturel, humain et physique. Le Gabon dispose de ressources exceptionnelles. La valeur des services fournis par l’écosystème des forêts est estimée à 43 200 milliards de francs CFA, soit environ 71,1 milliards de dollars en 2020. Mais ces atouts restent mal valorisés.
Pour Aïssatou Diallo, représentante de la Banque mondiale au Gabon, « ces ressources pourraient contribuer bien davantage à la croissance et au bien-être si elles étaient mieux intégrées dans les politiques publiques ».
Le ministre du Travail a, lui aussi, appelé à repenser les bases du modèle économique. « Trop longtemps, nos modèles ont relégué les ressources naturelles à la périphérie de nos décisions. En réalité, elles sont au cœur de notre économie. La comptabilité du capital naturel doit nous permettre de passer de l’exploitation à la valorisation », a déclaré Patrick Barbera Isaac.
Robert Utz a de son côté alerté sur les pressions exercées par les ménages sur les forêts, en raison de l’absence d’alternatives. « Il faut proposer des modèles agricoles plus productifs, moins destructeurs. Le Gabon a les moyens de réussir cette transition », a-t-il souligné.
À l’heure où les recettes pétrolières tendent à diminuer, la Banque mondiale encourage le Gabon à investir dans son capital humain, diversifier son économie, et bâtir un modèle plus équitable. L’enjeu est clair : transformer la richesse du sol en richesses pour tous.
Il s’agissait de la cinquième édition de la note de conjoncture économique du Gabon. Ce rendez-vous annuel vise à éclairer les politiques publiques à partir d’une analyse approfondie des dynamiques économiques du pays.
Antoine Relaxe et Luan Martinez
