Le réquisitoire fait par le Procureur général, près la Cour criminelle spéciale qui conduit le procès opposant l’Etat gabonais à Sylvia et Nourredin Bongo, n’a pas été tendre avec les coaccusés, en l’occurrence Ian Ghislain Ngoulou qualifié de « Nicolas Fouquet moderne du Gabon », Saliou Mohamed Ali et Abdul Océni Ossa, de « Fils d’Elie » pour avoir été des architectes des détournements massifs des deniers publics.
Bras droit de Nourredin Bongo Valentin, fils ainé de l’ancien Chef de l’Etat déchu, Ian Ghislain Ngoulou était devenu un « bras opérationnel de la corruption » ayant contribué au « pillage » des deniers publics du pays estimés à plus de 4000 milliards de FCFA, soit environ 60% de la dette du Gabon évaluée à plus de 7000 milliards? a-t-on appris du Procureur général.
Durant son réquisitoire, Dr Eddy Minang, a usé d’une figure de style pour montrer le « caractère dangereux » du comportement de Ian Ghislain Ngoulou qu’il a assimilé à celui de Nicolas Fouquet, lequel fut un surintendant des finances de Louis XIV, Roi français du 16e siècle. Ce dernier était devenu par la suite un « prédateur financier ».

« Fouquet n’avait pas besoin de la couronne ; il avait les clés du trésor ; il n’avait pas besoin d’un sceptre ; il avait le pouvoir des signatures, des flux, des décisions secrètes », a fait savoir le Dr Minang, soulignant que ce Fouquet « contrôlait la richesse du chef ».
Pour avoir été les architectes des « détournements massifs deniers publics et de blanchement des capitaux », Saliou Mohamed Ali et Abdul Océni Ossa, ces deux frères consanguins se seraient, selon le Procureur général, écartés de la droiture qu’incarnerait leur père Ismaël Océni Ossa, ancien Grand Imam de la Mosquée centrale Libreville.
En faisant allusion à un récit de la bible, le Procureur général a pris l’exemple d’Elie qui fut un grand prêtre. C’était un grand personnage qui avait une grande probité morale. Un homme dont la simple autorité suffisait à maintenir l’ordre moral de tout un peuple. Et ses deux fils, Hophni et Phineas, avaient grandi dans cette lumière. Ils avaient grandi dans la prière, dans le respect du sacré, dans l’aura d’un père irréprochable.
Poursuivant son narratif, Dr Eddy Minang, renseigne que ces deux fils devenus prêtres à leur tour, se détournèrent de Dieu et devinrent «des hommes pervers »(1 Samuel 2:12) ». La bible indique que lorsque les fidèles apportaient les offrandes destinées à Dieu, les fils d’Elie envoyaient un serviteur qui n’était pas là pour aider, ni pour servir, mais pour saisir. Dans sa main, une fourche. Une fourche à trois dents.
Massive, lourde, agressive. Ce serviteur plongeait violemment la fourche dans les marmites sacrées. Sans discernement. Sans pudeur. Sans crainte. Ce que la fourche arrachait, les fils d’Elie le prenaient. Ce que la fourche capturait, les fils d’Elie le dévoraient comme si tout leur appartenait.
« Cette scène résonne étrangement avec ce que nous avons vécu ici, au Gabon. Car, ce que les fils d’Elie faisaient avec leur fourche de fer, les frères Abdul et Mohamed l’ont fait avec leur nom, leur proximité avec Noureddin Bongo Valentin leur impunité supposée, leur arrogance sans limite », a-t-il fait constater à la cour.
Comme Nicolas Fouquet, les deux fils d’Eli ont été anéantis par leurs propres turpitudes.
Camille Boussoughou
